QUÉBEC Info
AUTOMNE 2004
Politique Économie Education International Société Culture **** L'INDUSTRIE DE LA CONSTRUCTION
L’industrie de la construction a connu un début d’année remarquable au Québec en raison surtout du dynamisme de la construction résidentielle. Pour les sept premiers mois de 2004, la valeur des permis de construction est en hausse de 19 % par rapport à celle de la même période en 2003. Pour la construction résidentielle, la hausse est de 30 % et cela en dépit d’un léger recul observé en juillet. La construction non-résidentielle enregistre quant à elle une baisse importante dans tout le Québec, mais quelques grands chantiers entraînent une forte croissance des activités dans certaines régions. C’est le cas pour la Côte Nord, qui a connu au deuxième trimestre une hausse de 108 % du nombre d’heures de travail ; cette hausse est attribuable au projet de l’aluminerie Allouette de Sept-Îles. À la Baie-de-James, la croissance de 94 % est due la réalisation de la centrale hydroélectrique Eastmain I. Pour l’ensemble du Québec, les heures travaillées dans l’industrie de la construction ont atteint leur plus haut niveau depuis 1978.
Ce sont surtout les logements collectifs qui ont contribué à l’essor de la construction résidentielle. La valeur des permis de construction pour les logements locatifs et les condominiums a été de 35 % ; elle représente 58 % de la valeur totale des mises en chantier depuis le début de l’année. Le secteur montre cependant des signes d’essoufflement ; le ralentissement observé en juillet s’est poursuivi en août. Il pourrait s’expliquer par la saturation du marché pour certains types de logements et par la hausse des taux hypothécaires à la suite du relèvement du taux d’escompte de la Banque du Canada. La Commission de la construction du Québec signale par ailleurs une pénurie de main-d’œuvre dans certains métiers névralgiques ; charpentiers-menuisiers, briqueteurs, couvreurs et plâtriers sont en forte demande.
**** HYDRO-QUÉBEC
Malgré des profits record au cours du premier semestre 2004, Hydro-Québec se présentera devant la Régie de l’énergie cet automne pour obtenir une hausse de tarifs pour 2005. Pour paradoxale qu’elle paraisse, cette démarche se comprend aisément quand on sait que les bénéfices exceptionnels du premier semestre comprenaient un gain extraordinaire de 284 millions dû à la vente de la participation d’Hydro-Québec dans Noverco. Sans ce gain, qui a été inscrit aux livres le 30 juin, les profits du premier semestre auraient été inférieurs de 11 % à ceux de la période correspondante en 2003. Les tarifs d’électricité ont été haussés à deux reprises depuis le début de 2004, de 3 % en janvier et de 1,4 % en avril. Ces augmentations survenaient après un gel des tarifs qui a duré six ans. La hausse envisagée pour 2005 est de 5,5 %. Les revenus supplémentaires ainsi obtenus seront consacrés à la consolidation et à la sécurisation du réseau de transport de l’énergie, notamment au raccordement des nouveaux sites de production de Toulnustouc, Péribonka, Eastmain ainsi que des éoliennes de la Gaspésie et des centrales thermiques du Suroît et de Bécancourt ; on procèdera aussi à l’installation d’un système de déglaçage sur certaines sections du réseau. Ces travaux exigeront des déboursés de 3,8 milliards de dollars d’ici 2008, dont 1 milliard dès 2005.
Vente de Noverco
Hydro-Québec était actionnaire majoritaire dans le holding Noverco dont le principal actif est constitué de 75 % des actions de Gaz Métropolitain. L’acquéreur des actions d’Hydro-Québec est Infragaz, une société en commandite dont les actionnaires sont la Caisse de dépôts et placements (69,4 %), SNC-Lavallin (11,1 %), la Caisse de retraite des employés du Mouvement Desjardins (8,3 %) et un fonds d’investissement de l’Ouest canadien (11,1 %). Les autres actionnaires de Noverco conservent leurs positions ; il s’agit de Enbridge, un distributeur de gaz naturel de l’Ouest canadien, qui détient 32 % des actions, et de Gaz de France qui en détient 17,6 %. Noverco possède par ailleurs environ 10 % des actions d’Enbridge.
Report de la décision sur le Suroît
La Régie de l’énergie a remis son avis au gouvernement sur le projet de centrale thermique Le Suroît, au terme de son mandat spécial qui expirait le 30 juin. La position de la Régie est ambiguë, dans la mesure où les deux parties impliquées peuvent l’interpréter à leur avantage. D’une part, le Suroît n’est pas jugé indispensable pour répondre aux besoins énergétiques du Québec au cours des années à venir : les pénuries occasionnelles pourraient être comblées par des achats d’énergie à des producteurs voisins. D’autre part, la Régie reconnaît que le projet est souhaitable parce qu’il représente une police d’assurance dans le contexte incertain qui entoure la prévision des besoins et l’évolution des marchés d’importation d’énergie. Le gouvernement conserve donc toute latitude pour prendre une décision sur la réalisation de ce projet. Cette décision est toutefois reportée à l’automne, après les audiences de la commission parlementaire sur l’ensemble du dossier énergétique, notamment sur les possibilités offertes par la filière éolienne et les programmes d’économie d’énergie.
Offres d’énergie éolienne
En réponse à son appel d’offres pour 1 000 MW d’énergie éolienne lancé en mai dernier, Hydro-Québec a reçu des soumissions portant sur 32 projets d’éoliennes d’une capacité totale de 4 000 MW ; tous ces projets se réaliseraient en Gaspésie, comme l’exigeaient les termes de l’appel d’offre. Hydro entend toutefois s’en tenir aux 1 000 MW qu’elle s’est engagée à acheter. Neuf producteurs ont soumis des propositions, la plupart regroupés en consortium ou associés à un fabriquant, de manière à répondre à une autre condition imposée : le matériel utilisé doit être, à raison de 40 à 60 %, produit ou assemblé en Gaspésie. Trois entreprises québécoises figurent parmi les soumissionnaires : le groupe Axor, qui exploite le seul site d’énergie éolienne du Québec, à Saint-Ulric de Matane en Gaspésie, et qui propose deux projets totalisant 531 MW ; la papetière Domtar, et Boralex dont les projets produiraient respectivement 75 MW et 33 MW. Boralex possède déjà, en énergie éolienne, une expertise acquise en France où elle exploite deux sites. Les autres soumissionnaires sont des consortiums canadiens ou étrangers. Les projets retenus seront annoncés au début de l’automne.
**** INDICATEURS ÉCONOMIQUES
Taux d'escompte
Le taux d'escompte officiel de la Banque du Canada est demeuré stable à 2,25 % au cours des mois de mai à août 2004.
Taux de change
Le taux de change du dollar canadien par rapport à la devise des États-Unis est passé de 0,7313 $ US à 0,7668 $ US entre fin avril et fin août 2004, soit une appréciation de 4,9 % ; le plancher atteint au cours de cette période a été de 0,7206 $ US.
Par rapport à l'euro, le dollar canadien est passé de 0,6179 € à 0,6342 € au cours de la même période, soit une appréciation de 2,6 % ; le taux le plus bas observé au cours de cette période a été de 0,5988 €.
**** ALCOA
Après six mois de négociations difficiles avec le gouvernement, Alcoa a finalement abandonné son projet de modernisation de l’aluminerie de Baie-Comeau ; aucune entente sur les futurs tarifs d’électricité n’a pu être conclue. La société comptait investir 1,1 milliard pour remplacer les cuves Soderberg, installées en 1950, par une technologie plus efficace et moins polluante ; cette modernisation aurait assuré l’emploi d’une bonne partie des 900 travailleurs employés dans cette partie de l’usine. Le projet devait bénéficier de diverses formes d’aide gouvernementale en vertu d’une entente qui a été remise en question par le nouveau gouvernement issu des élections d’avril 2003. Les parties se sont entendues sur la plupart des points de l’entente, mais un désaccord sur les tarifs d’électricité a fait échouer les négociations. Alcoa acceptait de payer le tarif " L " applicable aux industries, mais exigeait une garantie contre des hausses de tarif futures. Le gouvernement n’a pas accepté cette condition, qui l’aurait obligé à accorder la même garantie à l’ensemble de la clientèle industrielle et à absorber un important manque à gagner. La population de Baie-Comeau doit donc s’attendre à la fermeture des vieilles cuves en 2010 et à la disparition éventuelle de 900 emplois.
Un autre projet d’expansion d’Alcoa a été reporté, celui de l’agrandissement de l’usine de Deschambault. Le projet de un milliard vise à doubler la capacité de cette usine pour la porter à 500 000 tonnes métriques d’ici 2008.
**** BOMBARDIER
Pendant que la division aéronautique espère terminer l’année sans déficit, les synergies attendues du programme de rationalisation entrepris par le président Paul Tellier tardent à se manifester dans les résultats financiers de la filiale transport ; celle-ci n’affiche qu’un maigre rendement de 2,8 %. C’est néanmoins du côté de la division transport qu’est venue la meilleure nouvelle, soit l’obtention d’un contrat de 5,4 milliards pour la construction de 140 trains rapides en Chine ; ce montant ne représente que la part de Bombardier dans un contrat de 15,8 milliards accordé à un consortium international, auquel participent également Alstom et le groupe japonais Kawasaki Heavy.
Du côté aéronautique, les mauvaises nouvelles s’accumulent. Quelques semaines à peine après avoir renégocié le calendrier de livraison des appareils commandés à Bombardier, la compagnie US Airways se plaçait, pour la seconde fois en deux ans, sous la protection de la loi sur les faillites et remettait de nouveau en question la livraison des 45 derniers appareils. L’incertitude plane aussi sur la livraison des 42 appareils commandés par Delta Airlines depuis que cette dernière a annoncé un plan de redressement rigoureux qui prévoit notamment l’abandon de certaines liaisons et la réduction de la flotte. De plus, la négociation d’un contrat pour la livraison de 25 appareils à Gulf Air a été interrompue en raison des problèmes financiers que connaît cette compagnie. Mince consolation, Bombardier annonçait en juillet, au salon de l’aéronautique de Farnsborough, la vente de 20 jets régionaux au transporteur espagnol Air Nostrum.
Bombardier a profité aussi du salon de Farnsborough pour faire connaître son intention d’aller de l’avant avec une nouvelle famille d’avions d’une capacité de 110 à 135 sièges et appelée CSeries. La société n’a pas encore terminé le plan de financement de ce nouveau programme ni choisi le site de l’assemblage final. Ces deux questions sont d’ailleurs liées, dans la mesure où Bombardier compte sur une aide financière du pays où les appareils seront assemblés. Les centrales syndicales et les groupements d’affaires ont déjà commencé à se mobiliser au Québec pour obtenir une aide gouvernementale à Bombardier.
**** RÉGIE DES RENTES
Les fonds confiés à la Régie des rentes du Québec ont obtenu un rendement de 24,7 % au cours de l’exercice 2003-2004 ; c’est ce que révèle le rapport annuel de l’organisme à l’Assemblée nationale. Il s’agit du meilleur rendement annuel depuis 1985. Cette bonne performance survient après trois années de rendement négatif de 3,9 % en 2000-2001, 0,2 % l’année suivante et 13,5 % l’an dernier. Le fonds de réserve a progressé de 31 %, passant de 15,4 à 20,2 milliards, ce qui représente 2,8 fois les prestations annuelles. Les prestations versées aux bénéficiaires, au nombre de 1,3 million, ont totalisé 7,2 milliards, en hausse de 6 %, tandis que les cotisations ont rapporté 8,2 milliards, soit 11 % de plus que l'année précédente. La progression des cotisations s’explique par l’évolution favorable du marché de l’emploi et par le relèvement des taux de cotisation de 1,6 % en janvier 2003 et de 3,2 % en 2004.
**** LA SGF
La Société générale de financement a réalisé un profit de 9 millions de dollars au cours des 6 premiers mois de 2004. Ces résultats positifs restent éloignés de la cible que la nouvelle direction s’était fixée : un rendement de 5 %, soit un profit de 90 millions. Au cours de la période correspondante de l’année 2003, la société d’État avait essuyé une perte de 181 millions ; celle-ci résultait en grande partie de radiations effectuées dans le cadre d’une révision de sa mission et de ses objectifs, au lendemain des élections qui avaient porté le Parti libéral au pouvoir en avril 2003. Ces radiations n’avaient d’ailleurs pas fait l’unanimité chez les observateurs ; certains y voyaient une manœuvre pour discréditer l’ancienne direction. Mandatée pour évaluer la gestion de la Société, la Vérificatrice générale du Québec a cautionné l’évaluation des placements faite par la nouvelle direction ainsi que les décisions qu’elle a prises. Son rapport sur la qualité de la gestion antérieure n’a toutefois pas confirmé les présomptions de mauvaise gestion qui pesaient sur l’ancienne direction ; bien qu’il signale de nombreuses lacunes dans les procédures administratives et qu’il critique le système de bonus adopté pour la rémunération des cadres, le rapport ne dénonce aucune malversation ni faute majeure dans la conduite des affaires de la société. À la suite de ce rapport, la SGF a procédé à des changements importants dans le calcul des bonus accordés aux gestionnaires. Aucun bonus ne sera versé si les opérations sont déficitaires ; ce fut le cas en 2003. En cas de résultats positifs, le calcul des bonus se fera en appliquant la pondération suivante : 30 % en fonction du volume des investissements réalisés, 70 % selon la rentabilité du portefeuille ; sous l’ancienne administration, le rapport était inverse.
Un objectif d’investissement de 400 millions
Depuis le début de 2004, la SGF a réalisé des investissements de l’ordre de 115 millions, dont près de la moitié dans les usines d’Interquisa, de PTT Poly et de Coastal, des projets de la filière pétrochimique mis en marche sous l’administration précédente. La direction s’est donné pour objectif de réaliser des investissements annuels de 300 à 400 millions dans des projets "structurants" réalisés dans les régions ; les secteurs agro-alimentaire, minier et forestier seront considérés comme prioritaires. Cet objectif se rapproche sensiblement de ce qui prévalait sous la direction précédente, à une différence près et elle n’est pas négligeable : les fonds requis ne proviendront plus désormais du trésor public mais devront être trouvés dans le bilan de l’entreprise, par la vente de placements matures faisant partie du portefeuille. C’est dans cet esprit que la société a réalisé récemment une partie de sa participation dans Saputo pour un montant de 36 millions.
Des espoirs pour Magnola
Les deux propriétaires de Magnola, la société minière Noranda et la SGF, rencontrent des acheteurs potentiels de magnésium et nourrissent l’espoir d’une relance de la production dans quelques années. L’usine a cessé ses opérations il y a un an en raison d’un effondrement des prix attribué à l’arrivée de la Chine sur ce marché. Les prix se sont redressés et leur niveau actuel permettrait à Magnola de fonctionner à profit. La réouverture de l’usine ne peut être envisagée avant trois ans et elle n’aura lieu que si la vente d’une partie importante de la production est assurée par des contrats avantageux. La SGF a investi 200 millions dans ce projet, ce qui lui donne 20 % de la propriété ; la valeur de ce placement a été radiée presque entièrement des livres de la société.
**** JTI-MACDONALD PASSÉ À TABAC
Le troisième fabricant de cigarettes au monde, JTI-MacDonald, est pris à partie par le gouvernement du Québec qui lui réclame 1,36 milliard de dollars pour son implication dans le contrebande du tabac au cours des années 1990 et pour le manque à gagner qui en a résulté dans la perception des taxes.
Revenu Québec, le bras financier du gouvernement, s’appuie sur un jugement de la Cour supérieure du Québec pour fonder ses réclamations ; celles-ci couvrent la période du premier janvier 1990 au 31 décembre 1998 et portent sur des montants de 440 millions de dollars de taxes non perçues, 284 millions de pénalités diverses et 640 millions d’intérêts courus.
Le fabricant de cigarettes s’est déclaré surpris de l’attitude du ministre québécois du Revenu, Lawrence Bergman ; pourtant il avait déjà révélé que Revenu Québec avait l’intention de récupérer les sommes perdues par la contrebande de cigarettes. JTI-MacDonald a fait part de son intention de contester l’avis de paiement de la Cour supérieure et la réclamation du Québec. Craignant la faillite, la compagnie s’est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers. Le débat qui s’engage pourrait bien durer plusieurs années.
**** ALLIANCE ENTRE PEUGEOT ET H-Q
Hydro-Québec a conclu une alliance stratégique avec le fabricant d’automobiles Peugeot pour équiper de moteurs-roue le Quark, le dernier-né des prototypes de véhicule hybride du fabricant français. Le Quark doit être présenté au Mondial de l’auto 2004 qui s’ouvre à Paris le 23 septembre. Le système utilisé par Peugeot a été développé par TM4, la filiale d’Hydro-Québec chargée de la commercialisation des applications découlant du programme de recherche de l’Institut de recherche en électricité du Québec (IREQ). Hydro-Québec a investi près de 250 millions dans son programme de recherche sur la motorisation automobile, notamment sur les moteurs-roue et les batteries.
**** QUEBECOR
Quebecor a déclaré un profit de 6,6 millions au 2e trimestre, comparativement à une perte de 28,8 millions pour la même période en 2003. Cette amélioration des résultats est en grande partie attribuable à la filiale Quebecor World, qui a réalisé un profit de 15,3 millions en regard d’une perte de 61,7 millions l’an dernier. La direction de Quebecor World annonçait par la même occasion un investissement de 300 millions pour l’achat de 22 nouvelles presses à installer dans les imprimeries américaines au cours des deux prochaines années. Cette décision était prise depuis un certain temps, mais sa mise en œuvre était retardée en attendant une amélioration de la situation financière de l’entreprise.
**** LES BRASSEURS
Si les journées pluvieuses de l’été n’ont pas été favorables à la dégustation de bière à la terrasse des cafés, les tribunes économiques, toujours plus calmes en saison estivale, ont été comblées par les nouvelles portant sur les transactions dans le monde des brasseries québécoises. Après l’annonce au printemps de la vente d’Unibroue, fleuron des microbrasseries québécoises, au brasseur ontarien Sleeman, ce fut au tour de Molson, acteur dominant du marché canadien de la bière, de dévoiler au cours de l’été son projet de fusion avec la brasserie américaine Coors.
Unibroue menacée sur le marché québécois
Fondée en 1991, Unibroue s’est hissée au premier rang des microbrasseries québécoises, en tablant sur des produits originaux et une mise en marché audacieuse. La popularité de ses bières doit également beaucoup à la personnalité du chanteur Robert Charlebois, qui fut dès le début l’un des principaux actionnaires de l’entreprise, et à la touche nationaliste qu’Unibroue a su donner à ses produits. Une de ses bières, la "1837", a été nommée ainsi en souvenir du soulèvement, en 1837, des élites canadiennes contre l’administration coloniale britannique. D’autres portent des noms évocateurs de lieux, de personnes ou d’expressions populaires au Québec : l’Eau Bénite, la Trois-Pistoles, la Blanche de Chambly ; celle-ci rappelle que c’est à Chambly, en banlieue de Montréal, que se trouvent les installations de production d’Unibroue ; elles ont une capacité de 70 000 hectolitres par an.
La nouvelle de cette vente a suscité une certaine déception chez la clientèle dont le goût pour les produits de l’entreprise allait de pair avec la satisfaction d’encourager un produit "bien de chez nous". Au dire de la direction d’Unibroue, cette transaction était la meilleure façon d’assurer l’avenir de l’entreprise ; sa part du marché québécois plafonnait à un peu plus de 1 % depuis quelques années et elle devait faire face à la concurrence de plus en plus vive des grandes brasseries et des bières étrangères. Sleeman est déjà présente au Québec, où elle détient 5 % du marché. L’entreprise possède une usine à Boucherville dont la production sera transférée à l’usine de Chambly dès cet automne ; elle compte d’ailleurs faire passer la capacité de l’usine de Chambly à 140 000 hectolitres par année.
Molson menacée sur le marché mondial
C’est la position marginale de Molson sur le marché mondial qui a incité cette entreprise à chercher une association avec un autre producteur. Malgré une position dominante sur le marché canadien ,où elle accapare 44 % des ventes, la brasserie montréalaise ne figurait qu’au 13e rang mondial, avec un chiffre d’affaires quatre fois moindre que Miller, le plus petit des quatre grands qui dominent le marché mondial et six fois moindre que le leader mondial, la brasserie américaine Anheuser Busch. En juillet, Molson dévoilait donc un projet de fusion avec la brasserie américaine Coors, une entreprise familiale elle aussi, avec laquelle elle était déjà liée par des accords de commercialisation ; Coors se situe au 9e rang mondial et souffre des mêmes désavantages concurrentiels que Molson. L’entreprise née de cette fusion occuperait le 5e rang.
La nouvelle a suscité bien des questions : s’agit-il d’une fusion ou d’une prise de contrôle déguisée ? Les déboires de Molson au Brésil, ses mauvaises décisions stratégiques au cours des années 1980 et les conflits récents entre des membres de la famille en font une proie facile pour une acquisition. Ce qui renforce le scepticisme à propos de la fusion avec Coors, c’est qu’une offre concurrente pourrait contrecarrer ce projet ; Ian Molson, un des membres de la famille récemment exclu du conseil d’administration, s’activerait à la préparation d’une telle offre en s’associant avec un autre brasseur d’envergure mondiale.
Pour les analystes, il ne fait pas de doute que l’existence de Molson comme entreprise indépendante tire à sa fin, avec la conséquence que le contrôle local sur le marché québécois de la bière se trouvera réduit à sa plus simple expression : il restera à peine 3 % du marché pour les microbrasseries québécoises et même en y ajoutant les 6 % du marché accaparés par Sleeman, la part des brasseurs locaux demeurera marginale