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AUTOMNE 2004

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ÉDUCATION

**** LA GRATUITÉ SCOLAIRE

En principe, l’enseignement primaire et secondaire du système public d’éducation est gratuit.  Mais il faut compter avec les frais afférents imposés par les commissions scolaires et les directions d’écoles.  Pour les parents, la facture est de plus en plus élevée ; elle a grimpé de 44 % en quatre ans.

Les frais afférents comprennent les frais pour le matériel pédagogique périssable : cahiers d’exercices, matériel d’arts plastiques, de musique, etc., le transport scolaire, la surveillance à midi et les activités parascolaires.  À cela s’ajoutent les fournitures scolaires que les parents doivent acheter chaque année.  Certains, de plus en plus nombreux, doivent payer aussi pour l’inscription à des programmes particuliers : sports-études, volet international, perfectionnement en langue et autres programmes spéciaux.  À toutes ces dépenses, il faut ajouter bien entendu l’achat des vêtements et bien d’autres frais.  S’il est vrai que les coûts varient d’une école à l’autre, aussi bien au primaire qu’au secondaire, il reste que la contribution des parents est de plus en plus importante.  Dans ces conditions, peut-on encore parler de gratuité scolaire ?

Pour comprendre la situation financière du système scolaire, il faut se rappeler, dit André Caron, président de la Fédération des commissions scolaires du Québec, qu’il a été victime de compressions budgétaires de 1,2 milliard de dollars entre 1996 et 1999.  Les commissions scolaires ont dû s’ajuster et réduire les services qui ne sont pas utilisés par tous les élèves.  En outre, en 2003, le gouvernement récemment élu supprimait un programme de 15 millions de dollars en vigueur depuis quatre ans et qui soulageait les parents d’une partie des frais de la rentrée scolaire.  Ce qui fait dire à la présidente de la Fédération des comités de parents, Diane Miron, également membre du comité créé par le ministère de l’Éducation pour évaluer les coûts dans l’ensemble du réseau scolaire : " Il faut revoir la situation à long terme pour que les coûts cessent d’augmenter ; c’est le principe de la gratuité scolaire qui est remis en question ".

Saisi du rapport du comité et de ses recommandations, Pierre Reid, ministre de l’éducation, affirme qu’il a " l’intention d’agir sur ces pistes d’action " mais, ajoute-t-il, il y a déjà " un effort considérable du côté de l’État ".  Il rappelle aussi que " selon nos lois, les parents ont toujours une partie des frais à payer pour ce qui est du matériel de base et pour certaines activités ".  Les parents doivent, au dire du ministre, assumer leur juste part des coûts de l’éducation.


**** LES CÉGEPS DANS LA TOURMENTE

Depuis que le gouvernement a invité divers acteurs du monde de l’éducation à réfléchir sur l’avenir du réseau collégial, les collèges d’enseignement général et professionnel (cégeps) sont dans la tourmente.  La Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ) souhaite l’abolition pure et simple du réseau des collèges publics ; cela permettrait aux commissions scolaires de s’approprier une partie de l’enseignement dispensé au niveau collégial et de l’intégrer au niveau secondaire par l’ajout d’une sixième année.  De leur côté, les universités sont favorables, elles aussi, à la disparition des cégeps afin de récupérer une partie de leur clientèle en ajoutant une quatrième année aux études de premier cycle.  Cette offensive contre l’enseignement collégial s’inspire de l’étude commandée par la Fédération des commissions scolaires à l’ancien secrétaire du Conseil du trésor, Denis Bédard ; dans son rapport, celui-ci recommande d’abolir la formation pré-universitaire dispensée au collégial et de partager cet enseignement de deux ans entre le secondaire et à l’université.

La Fédération des cégeps n’a pas tardé à réagir.  Elle demande au ministère de l’Éducation d’accroître les pouvoirs des cégeps plutôt que de les supprimer ; il conviendrait d’appliquer à l’enseignement collégial le modèle en vigueur dans l’enseignement supérieur en accordant aux établissements la pleine maîtrise des programmes d’étude, la capacité de décerner les diplômes et la responsabilité de gérer les relations de travail.

Les tenants des différentes options se sont affrontés au cours d’un " Forum sur l’avenir des cégeps " convoqué par le ministre de l’Éducation, Pierre Reid, en juin dernier.  Depuis, le gouvernement a tranché.  Plutôt que de supprimer le système collégial, il favorise une collaboration volontaire entre les commissions scolaires et les directions des cégeps pour fusionner, dans le cadre de projets-pilotes, les formations professionnelle et technique.  Le gouvernement a donc fait de la fusion de ces deux formations une priorité en éducation.  Déjà, des pourparlers sont en cours entre la Fédération des cégeps, la Fédération des commissions scolaires et l’Université du Québec pour la conception et la mise en œuvre de certains projets.

Toutefois cette orientation ne fait pas le bonheur de tout le monde.  La Fédération étudiante collégiale s’y oppose avec vigueur.  Sa présidente, Julie Bouchard, craint que les projets-pilotes ne donnent naissance à des structures décentralisées, ce qui pourrait affecter la qualité de la formation.  De son côté, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) a exprimé, par la voix de sa présidente Claudette Charbonneau, son désaccord avec l’autonomie pédagogique et administrative des cégeps et son opposition aux projets-pilotes.  " Nul besoin de créer des cégeps à géométrie variable " dit-elle ; " le morcellement du réseau viendrait pervertir la mission des cégeps et mettre en péril l’accès à un système d’éducation public et démocratique ".

La rentrée d’automne s’est faite sans éclat dans les cégeps, mais le mécontentement latent demeure perceptible ; le feu couve sous la cendre.