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AUTOMNE 2003

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SOCIÉTÉ

**** LES ACADIENS

L’année 2004 marque le 400e anniversaire de la première tentative d’établissement permanent de colons français en Amérique.  Cet anniversaire a été souligné par tous les Acadiens, aussi bien ceux qui vivent dans les provinces maritimes canadiennes que ceux qui habitent au Québec, particulièrement aux Ïles-de-la-Madeleine et sur la Côte Nord, en Nouvelle-Angleterre ou en Louisiane.

Le sommet des commémorations fut le troisième congrès mondial acadien qui réunit à Grand-Pré quelque 5 000 personnes le jour de son  ouverture, le 31 juillet.  De nombreuses festivités destinées à rappeler ce premier essai de colonisation et d’évangélisation ont eu lieu tout au cours de l’été 2004 et se poursuivent cet l’automne.  Le programme présentait, au cours du mois d’août, 1 200 activités organisées dans une soixantaine de communautés acadiennes.  L’anniversaire a été souligné ailleurs également : à Québec, à Halifax et même à Lorient, en Bretagne, à l’occasion du 34e Festival interceltique.  De nombreuses personnalités politiques, dont les premiers ministres de France et du Canada et le gouverneur de la Louisiane, ont participé à ces célébrations.

Rencontres et spectacles évoquaient l’arrivée des premiers colons français en Amérique.  En 1600, Chauvin avait tenté d’établir une colonie à Tadoussac, sans succès.  À partir de 1603, Champlain explora le Saint-Laurent, puis les côtes atlantiques en vue de découvrir un emplacement idéal.  Le groupe de 80 personnes passa l’hiver de 1604 à l’île Sainte-Croix ; près de la moitié mourut et on déménagea la colonie à Port-Royal.  Champlain continua d’explorer la côte vers le sud, vers l’Arcadie de Verrazzano, mais il ne trouva pas l’emplacement rêvé ; en 1607, tous les colons furent rapatriés en France.  En 1608, Champlain s’établit à Québec.  Après une interruption de 3 ans, la colonisation de la côte atlantique reprit lentement et difficilement, mais avec des résultats durables cette fois.


**** LE MONT MÉGANTIC

L’observatoire le plus puissant de l’est de l’Amérique du Nord est situé sur le mont Mégantic (1 105 m d’altitude), dans les Appalaches, au sud-est de l’Estrie.  Il s’agit d’une région peu peuplée, mais l’éclairage  -  la pollution lumineuse, pour les astronomes  -  y a doublé au cours des 20 dernières années ; à terme, l’efficacité scientifique du télescope pourrait en être compromise.

Les responsables de l’Astrolab du Mont-Mégantic, qui est principalement au service des chercheurs des universités Laval, Montréal et McGill, souhaitent que l’on fasse de cette région " une réserve de ciel noir ".  Il faudrait pour cela que l’on réduise la pollution lumineuse de 50 % dans un rayon de plus de 50 km incluant la ville de Sherbrooke.  Cela supposerait en particulier que l’on remplace l’éclairage extérieur actuel par des luminaires plus performants : routes, rues, institutions publiques, centre commerciaux, hôpitaux, etc.  Certaines mesures fort simples ont aussi leur efficacité : s’assurer que l’éclairage extérieur est bien dirigé vers le sol, fermer ou réduire fortement certains éclairages, ceux des terrains de jeux par exemple, lorsqu’ils ne sont plus nécessaires.  Il y aurait bien entendu des coûts liés à la mise ne œuvre de ces mesures, notamment pour la conversion des équipements, mais ils seraient compensés en partie par des économies d’énergie.  La collaboration de la région à ce projet semble acquise.


**** RECUL DU TABAGISME

Les plus récentes statistiques sur l’usage du tabac montrent que le nombre de fumeurs au Québec a considérablement diminué au cours des dix dernières années.  En 2003, on comptait 20,7 % de fumeurs comparativement à 29,1 % en 1994.  Il s’agit là d’un gain très significatif et la santé des Québécois ne peut s’en porter que mieux.

Le recul du tabagisme se vérifie dans toutes les tranches d’âge de la population, notamment chez les jeunes.  La proportion de jeunes de 10 à 14 ans qui fument tous les jours est passée de 7 % à 5 % entre 1994 et 2002.  Chez les adolescents, de 15 à 19 ans, le pourcentage de fumeurs a baissé de 5 points, passant de 18,6 % à 13,9 %.  Dans la catégorie des 20-24 ans, la diminution est plus faible puisque le pourcentage de fumeurs est passé de 26,6 % à 24,1 %, soit une baisse de 2,5 points seulement.


**** ASSURANCE MÉDICAMENTS

Depuis 2002, une loi oblige la Régie de l’Assurance maladie du Québec (RAMQ) à ajuster annuellement les primes de l’assurance médicaments aux coûts du régime.  À la mi-juin, la RAMQ annonçait une hausse de 7,4 % ; la prime annuelle passait ainsi de 460 $ à 494 $ au 1er juillet 2004.  La hausse du prix des médicaments constitue le facteur principal de l’augmentation des coûts du système de santé.  Nombreux sont ceux qui réclament que l’État mette au pas les compagnies pharmaceutiques, particulièrement celles qui produisent des médicaments non brevetés, et exige des médecins qu’ils soient plus rigoureux dans la prescription de médicaments.  De toutes les provinces du Canada, le Québec est celle où le nombre de prescriptions par habitant est le plus élevé.


**** UNE RADIO AM EN ÉBULLITION

Le personnel du poste de radio AM de Québec, CHRC, a vigoureusement protesté contre les visées centralisatrices du réseau Corus Entertainment qui veut faire l’acquisition des six stations québécoises du réseau Radiomédia actuellement détenues par Astral Média.  L'enjeu est de taille puisque Corus veut réduire la production locale de CHRC, la plus vieille station de radio privée de Québec ; celle-ci est maintenant la seule radio AM de la capitale, toutes les autres stations diffusant désormais sur la bande FM.  De plus, CHRC est la seule radio commerciale à Québec dont les journalistes font des reportages sur les événements qui se déroulent dans la capitale et sa région.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) doit se prononcer bientôt sur la requête de Corus.  Le maire de Québec, plusieurs personnalités et bon nombre d'organismes souhaitent que le CRTC tienne compte de la production d'émissions d'information, de reportages, d'analyses et d'enquêtes sur des sujets d'intérêt régional ayant une incidence locale, en un mot sur la mission sociale d'une radio AM, avant de permettre la transaction et d’octroyer un nouveau permis de diffusion.


**** RAI INTERNATIONAL

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a opposé une fin de non-recevoir à la chaîne de télévision italienne RAI International qui demandait l’autorisation de diffuser ses émissions au Canada par satellite.  Les Italo-Québécois devront donc attendre encore avant de pouvoir regarder la télévision de leur pays d’origine.

Les porte-parole de la communauté italienne ont fortement réagi à l’annonce du refus du CRTC.  Il faut dire que pendant la campagne électorale de juin dernier, les politiciens fédéraux avaient promis aux associations italiennes d’appuyer la demande de RAI International.  Mais le CRTC, organisme régulateur des ondes au Canada, est indépendant du pouvoir politique et il en a décidé autrement.  La diffusion de RAI International est un enjeu de taille pour la communauté italienne, déclare Nino Calavecchio du Congrès national des Italo-Canadiens.  Mes compatriotes, ajoute-t-il, souhaitent s’intégrer au Canada tout en gardant un lien avec leur culture d’origine.  Le Congrès promet de faire des démarches auprès des politiciens qui leur ont fait miroiter des promesses tant qu’il n’aura pas obtenu satisfaction.


**** SUR LE BANC DES ACCUSÉS

À Québec, une station de radio a fait l'objet de plusieurs plaintes auprès de l'organisme régulateur des ondes, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Ses animateurs vedettes ont usé et abusé de la liberté d'expression sur les ondes publiques proférant des propos offensants qui ont exposé à la haine et au mépris collectif des individus et des groupes pour des motifs fondés sur la déficience mentale, la race, l'origine ethnique, la religion, la couleur et le sexe. Ils ont fait preuve d'acharnement indu dans leur utilisation des ondes publiques pour notamment insulter et ridiculiser des gens, les désignant à la vindicte populaire.

Le CRTC ne pouvait rester insensible au nombre de plaintes reçues, soit 45 plaintes en 17 mois. Auparavant, il avait enregistré 47 plaintes pour des propos tenus en ondes. Elles émanent d'individus, hommes ou femmes politiques, d'artistes, de journalistes, d'administrateurs publics aussi bien que d'organismes, d'institutions et des médias.

Une première fois, en 2002, le CRTC avait sévi contre la station fautive, ne renouvelant son permis de diffusion que pour deux ans. Une deuxième fois, en février 2004, il a convoqué les propriétaires à une audience publique, à Québec, pour qu'ils expliquent leur comportement et exposent les raisons pour lesquelles le CRTC devrait maintenir leur permis de diffusion.

Après un examen minutieux des faits, le CRTC a pris une décision sans précédent en refusant le renouvellement du permis et en décrétant que la station devait cesser de diffuser au plus tard le 31 août 2004.

À Québec, la décision a eu l'effet d'une bombe puisqu'elle met au ban de la société la station radiophonique la plus populaire; elle rejoint 380 000 auditeurs, trois fois plus d'hommes que de femmes, surtout des jeunes de 18 à 34 ans et une tranche importante des gens âgés de 35 à 44 ans. Elle offre d'ailleurs à ces jeunes auditeurs la musique qu'ils aiment et un style d'animation qui les rejoint.

Les réactions ne se sont pas faites attendre. L'entreprise propriétaire de la station crie à l'injustice, à l'arbitraire, à la censure et au mépris de la liberté d'expression. En ondes, les animateurs demandent à leurs auditeurs de se porter à la défense de leur station. Ils répondront à l'appel : un important groupe - 50 000 personnes, diront-ils, mais plutôt 10 000, diront d’autres  - composé en majorité de jeunes hommes, marchent dans les rues de Québec en signe de protestation. Une pétition réclamant une révision du jugement du CRTC recueillera 200 000 signatures.

Mais tous ne sont pas de cet avis. La ministre fédérale, Liza Frulla, responsable du CRTC, refuse d'intervenir, respectant l'autonomie et l'autorité de l'organisme régulateur. L'Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) dont la station est membre décide de ne pas prendre position dans le litige et lui refuse son appui.

Le monde politique se sent particulièrement interpellé puisque les défenseurs de la station parlent d'attaque à la liberté d'expression et au droit à l'information. Le Comité national des jeunes du Parti Québécois estime que la station a eu plusieurs occasions de s'amender mais qu'elle a continué à diffuser des propos diffamatoires. Le chef du Parti Québécois n'a pas voulu se prononcer, le dossier étant maintenant soumis à la Cour d'appel, et le premier ministre du Québec et chef du Parti libéral du Québec a jugé excessive la décision du CRTC. Le chef de l'Action démocratique du Québec a pris à partie le CRTC et, en plus, a réclamé que le Parlement du Québec se réunisse en session spéciale pour adopter une loi dotant le Québec du pouvoir d'émettre lui-même une licence de radiodiffusion. Mais la proposition a été refusée par le premier ministre qui n'entend pas créer une version québécoise du CRTC. Il souhaite cependant que le CRTC intègre dans ses rangs une délégation québécoise pour lui permettre de refléter la réalité québécoise et tenir compte de sa réalité linguistique.

Le nouveau député du Bloc Québécois, Maka Kotto, issu du milieu théâtral, a suggéré le transfert du secteur des communications sous la responsabilité du Québec. À Ottawa, les partis d'opposition ont vertement critiqué le gouvernement qui refuse d'intervenir et d'infirmer la décision de l'organisme régulateur des ondes, la jugeant d'une sévérité excessive pour punir des propos tenus à l'antenne.

Les journaux ont été inondés de lettres des lecteurs critiquant le CRTC et se portant à la défense de la liberté d'expression. D'autres, sans appuyer nécessairement la sévérité du CRTC, rappellent que la liberté a des limites et ne saurait aller à l'encontre du droit du public à l'information et au respect. Les éditorialistes y sont allés de leurs commentaires rappelant les limites de la liberté d'expression sur des ondes publiques et la nécessaire obligation de respecter l'intégrité morale des personnes et la vérité de l'information diffusée. Philosophes, juristes, traducteurs, communicateurs, enseignants, éthiciens, sociologues sont intervenus dans la presse écrite produisant de percutantes analyses des principes mis en cause dans le débat.

L'entreprise a porté sa cause en appel et a déposé une requête de quelque 10 000 pages ; elle a obtenu une audience et demandé que l’on surseoit à l'exécution de la décision jusqu'à ce que la cause soit jugée sur le fond, à savoir: le pouvoir du CRTC d'intervenir sur des propos relevant de la liberté d'information, eu égard à la Charte canadienne des droits et libertés.

Ni le CRTC, ni son tuteur le gouvernement fédéral n'ayant fait opposition à la requête de la station, la Cour a accordé le sursis demandé. La station peut donc rester en ondes pour une période indéterminée, soit jusqu’à ce que la cause soit entendue et le jugement définitif prononcé.  À suivre!

Le nom de cette station ? CHOI-FM, " puisqu’il faut l’appeler par son nom ".


**** IN MEMORIAM

Jean-A. Pouliot est décédé à Montréal le 8 août 2004, à l'âge de 81 ans.  Diplômé en 1945 de la seconde promotion d'ingénieurs en électricité au Québec, Jean Pouliot a fait une brillante carrière en radiotélévision et en câblodistribution.  Alors que la télévision n’en était qu’à ses débuts, il supervisa la mise en place de deux stations, l'une à Kitchener en Ontario, l'autre à Québec, sa ville natale.  En 1957, il devint directeur général de Télévision de Québec, puis co-fondateur du réseau TVA en 1971 et de la chaîne anglophone CFCF en 1979.  En 1982, il acquit CFCF Cable TV, quatrième société de câblodistribution au Canada.  En 1985, il fonda un deuxième réseau privé de télévision de langue française, TQS.  On peut dire de Jean Pouliot qu’il a largement contribué à l'essor du Québec moderne dans le domaine des communications.