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PRINTEMPS-ÉTÉ 2000

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vvÉCONOMIE

***** BUDGET 2000-2001 : RETOUR DE LA MARGE DE MANOEUVRE

C'est sur un bilan de santé économique resplendissant que Bernard Landry a entrepris la présentation de son budget le 14 mars. Pour la première fois depuis le milieu des années 1970, le ministre des Finances disposait d'une marge de manœuvre appréciable sans recourir au déficit. C'est là une récompense bien méritée après les douloureux exercices de compression des dépenses que le gouvernement s'était imposés pour parvenir à l'équilibre budgétaire. Des réductions de l'impôt des particuliers et des investissements additionnels dans la santé et l'éducation absorberont la plus grande part de ces disponibilités. Plusieurs autres mesures sont aussi annoncées, notamment pour stimuler les investissements, pour le développement régional et pour la culture.

Réduction de l'impôt des particuliers

Les contribuables québécois bénéficieront de réductions d'impôt de 4,5 milliards $ au cours des trois prochaines années. Elles toucheront toutes les catégories de contribuables, mais bénéficieront particulièrement aux familles disposant de revenus moyens. Ainsi, une famille de deux enfants avec un revenu de 40 000 $ paiera 30 % (1024 $) d'impôt en moins en 2002. La réduction sera de 22,5 % (1448 $) pour un revenu de 50 000 $ et de 16 % (1624 $) pour un revenu de 70 000 $. Pour les contribuables à revenus élevés, les réductions seront d'environ 4 % dès cette année et atteindront 8 % en 2002. Deux mesures concourrent à ces allégements fiscaux : la réduction des taux d'imposition et le relèvement des tranches de revenus auxquels ils s'appliquent.

Les réductions annoncées sont supérieures à celles que le ministre des finances avait laissé entrevoir en novembre dernier, au terme des consultations parlementaires qu'il avait tenues sur le sujet. Il avait alors évoqué des réductions de l'ordre de 1,5 à 2,0 milliards $. Une meilleure performance de l'économie aura contribué à élargir la marge de manœuvre. Le ministre a aussi parlé de la possibilité de nouvelles réductions au cours des prochaines années si la situation le permet.

Bonnes performances de l'économie

Les résultats économiques de 1999 constituent la meilleure performance de l'économie du Québec depuis un quart de siècle. La croissance du PIB a dépassé les prévisions les plus optimistes faites en début d'année pour atteindre 3,7 %. En 1999, l'exposé budgétaire du ministre Landry pour l'exercice 1999-2000 s'appuyait sur des prévisions conservatrices de 2,1 %. La situation économique n'a cessé de s'améliorer tout au long de l'année, amenant les analystes à réviser leurs pronostics à plusieurs reprises. Le bilan est aussi remarquable sur le plan de l'emploi. L'économie québécoise a créé 76 000 emplois en 1999, un niveau qui n'avait pas été atteint depuis 1987, ce qui a contribué à abaisser le taux de chômage à son niveau le plus bas depuis fort longtemps. Les perspectives s'annoncent encore favorables pour l'an 2000. Le ministre table sur une croissance de 3,3 % du PIB en 2000 et de 2,9 % en 2001, ce qui correspond aux prévisions des analystes du secteur privé.

Les dépenses augmenteront au rythme du PIB

La bonne santé de l'économie permet par ailleurs d'envisager une croissance des dépenses publiques pour répondre à des besoins pressants accumulés au cours des années de lutte au déficit. Les dépenses de programme augmenteront au même rythme que le PIB, soit, selon les prévisions, de 3,3 % en 2000-2001 et de 2,9 % en 2001-2002.
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***** NASDAQ À MONTRÉAL

C’est avec une grande satisfaction que les milieux d’affaires québécois ont accueilli la nouvelle de l’implantation prochaine de la Bourse électronique Nasdaq à Montréal. Le Premier ministre Lucien Bouchard et le ministre des Finances, Bernard Landry, ne dissimulaient pas leur satisfaction, eux non plus, après la signature d’une entente qui prévoit l’implantation de Nasdaq Canada dans la métropole québécoise dès l’automne prochain. Les opérations seront développées par étape. Au début, seuls les titres inscrits sur la Bourse Nasdaq américaine y seront transigés. Les titres canadiens seront introduits au cours de l’an prochain. Au terme de l’implantation, la Bourse Nasdaq Canada sera reliée aux autres antennes du réseau mondial en voie de se constituer.

À la fin de 1999, Nasdaq annonçait la création de Nasdaq-Europe et, au début de mai, elle s’alliait à la nouvelle bourse iX qui regroupe les bourses de Londres et de Francfort. Nasdaq doit inaugurer une antenne à Osaka (Japon) dès le mois de juin. Des accords de coopération avec Hong Kong, Shanghai et Sidney (Australie) sont en préparation.

Pour les milieux financiers québécois, cette décision comble le vide laissé par la fermeture de la Bourse de Montréal l’automne dernier. La réorganisation des bourses canadiennes a alors concentré à Toronto les transactions sur les titres des grandes entreprises, laissant à la Bourse de Montréal le marché des produits dérivés. L’opération avait laissé une profonde insatisfaction dans la communauté d’affaires québécoise. Des chefs d’entreprise avaient dès ce moment manifesté leur intention de se tourner vers la Bourse américaine Nasdaq, plutôt que vers Toronto ou vers la Bourse de l’Ouest (Calgary) qui se voyait réserver les transactions sur les titres des petites et moyennes entreprises. L’absence d’une place boursière était perçue comme un sérieux handicap pour Montréal. Après avoir envisagé une intervention pour bloquer cette réorganisation, le gouvernement du Québec s’y était finalement résigné, au nom d’une rationalité économique inéluctable.

Les impacts réels de cette nouvelle initiative ne pourront être connus que dans quelques années, mais, pour plusieurs observateurs, le Québec, en accueillant une antenne sur la nouvelle économie financière mondiale, réussit à accroître la force d’attraction de Montréal.

La nouvelle a suscité des réactions plutôt négatives dans les milieux d’affaires de Toronto. Mais, selon certains observateurs, elle a ceci de positif qu’elle permet le retour de la concurrence sur les marchés boursiers canadiens.
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***** ALBAN D'AMOURS, PRÉSIDENT DU MOUVEMENT DESJARDINS

L’élection d’un nouveau président au Mouvement Desjardins constitue un événement de premier ordre au Québec, étant donné qu’il s’agit à la fois d’un mouvement coopératif dont 5 millions de Québécois sont membres et aussi de la plus importante institution financière du Québec avec des actifs dépassant les 75 milliards $. De plus, ce changement à la présidence survient l’année même du centième anniversaire de fondation de la première caisse populaire Desjardins.

Le 19 février, après six tours de scrutins, les 239 membres du collège électoral ont donc élu Alban D’Amours à la présidence du Mouvement Desjardins et ce, pour un mandat de quatre ans. Les six autres candidats se sont tous ralliés au nouveau président qui est d’ailleurs reconnu pour être un rassembleur. Les échos de son élection ont été des plus favorables à travers tout le Québec.

Alban D’Amours fait partie de la direction du Mouvement Desjardins depuis 1987, ayant été d’abord vice-président planification, communication, marketing, puis vice-président principal et chef du développement et de la vérification, et enfin, inspecteur et vérificateur général. Auparavant, il avait été sous-ministre au Revenu et à l’Énergie, après avoir poursuivi une première carrière de professeur aux universités du Minnesota (USA) et de Sherbrooke.

Il succède à Claude Béland qui a présidé aux destinées du Mouvement Desjardins ces treize dernières années. C’est dans la continuité que se fait ce changement de président. La réorganisation du Mouvement Desjardins (sa réingénierie, selon l’expression consacrée), entreprise par Claude Béland et appuyée par l’ensemble du mouvement, sera poursuivie avec vigueur par Alban D’Amours. Celle-ci consiste notamment à mettre rapidement en place la nouvelle et unique Fédération qui remplacera les onze fédérations régionales actuelles, et également à réduire de moitié le nombre de caisses populaires les faisant passer de 1143 à 600.

Alban D’Amours veut faire de Desjardins une entreprise financière efficace et rentable car, sans cela, le Mouvement n’aurait pas d’avenir. Les objectifs qu’il poursuit sont de promouvoir le caractère authentiquement coopératif du Mouvement Desjardins ainsi que le service aux membres. Par ailleurs, il vise à en faire un acteur dynamique dans l’économie québécoise et une entreprise de classe mondiale en s’associant avec des partenaires québécois tels que la Caisse de dépôt et placement et la Société générale de financement et en développant également des alliances internationales avec des institutions financières coopératives d’ailleurs.

Tel est, en bref, le mandat qu’Alban D’Amours s’est lui-même donné lors de l’Assemblée générale annuelle du Mouvement Desjardins qui avait lieu le 25 mars. Ce fut aussi l’occasion pour le président sortant, Claude Béland, de livrer son dernier rapport aux membres, de passer les pouvoirs à Alban D’Amours, d’être l’objet d’une soirée hommage à laquelle assistait le Premier ministre Lucien Bouchard, et de lancer les festivités qui marqueront le centenaire du Mouvement Desjardins tout au long de l’an 2000.
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***** QUEBECOR : DES REVENUS RECORD EN 1999

Les revenus consolidés de Quebecor ont atteint 10,8 milliards $ en 1999, en hausse de 28,6 % par rapport à ceux de l’exercice précédent. Le bénéfice net s’est amélioré de 7 % pour atteindre 186 millions $, soit 2,86 $ par action. Ces résultats reflètent l’acquisition, en 1999, de World Colour Press, la plus importante jamais réalisée par la multinationale québécoise. Ils cachent toutefois une contre-performance de Donohue, dont la contribution au bénéfice consolidé a diminué de 21 %. Ce recul s’explique par une baisse de 72 $ la tonne, en 1999, du prix de vente moyen du papier journal.
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***** BOMBARDIER : DES VENTES RECORD

Bombardier Aéronautique a annoncé, le 29 mars dernier, la conclusion du plus gros contrat de vente de son histoire. La transaction de plus de 2 milliards $ US (2,92 milliards $ canadiens) conclue avec deux filiales de Delta Airlines porte sur la vente ferme de 94 jets régionaux des séries CRJ 200 et CRJ 700. Elle comprend de plus une option sur 406 appareils supplémentaires.

La livraison des appareils doit débuter en décembre prochain et s’étaler jusqu’en 2004. Leur production nécessitera l’embauche de 600 employés additionnels aux usines de Bombardier à Dorval et à Saint-Laurent, près de Montréal, et d’environ 400 autres chez les fournisseurs de la région.

Quelques jours plus tôt, Bombardier avait annoncé la vente de 44 appareils à la firme espagnole Air Nostrum, pour un montant de 1,2 milliard $. Cette vente porte sur 29 turbopropulseurs Q300 Dash 8 et sur 15 jets régionaux CRJ 200. La transaction comprend aussi une option sur 40 autres appareils.
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***** L’EAU, RESSOURCE À PROTÉGER, À PARTAGER ET À METTRE EN VALEUR

Le territoire du Québec comporte 180 000 km² d’eau douce et constitue donc un immense réservoir. Soucieux de la bonne gestion de cette ressource, le gouvernement avait demandé au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) de mener une enquête sur la gestion de l’eau. La Commission sur la gestion de l’eau au Québec, aussi nommée Commission Beauchamp du nom de son président, a procédé à des consultations et tenu des audiences publiques. Ainsi, 379 mémoires ont été déposés. Le 2 mai dernier, la Commission rendait publique un volumineux rapport intitulé : L’eau, ressource à protéger, à partager et à mettre en valeur.

Le rapport dispose d’emblée de quelques questions qui font souvent la manchette :

- Doit-on envisager d’exporter massivement de l’eau ? En effet, il a déjà été proposé de transporter de l’eau douce du Québec par bateau vers les pays du golfe d’Arabie, ou d’en exporter vers les États-Unis par dérivation de rivières. Pour la Commission, l’exportation massive de l’eau doit être interdite; elle ne se justifie ni du point de vue de l’économie, ni du point de vue de l’environnement. D’ailleurs, la Loi sur la préservation des ressources en eau de 1999 interdit déjà les transferts massifs d’eau hors du Québec.

- Doit-on permettre l’exploitation commerciale des eaux souterraines ? Oui, la vente de l’eau captée et mise en bouteilles au Québec ne saurait représenter qu’une infime partie de la nappe phréatique. Mais cette pratique doit être réglementée. Tout projet qui vise à retirer plus de 75 mètres cubes d’eau souterraine par jour devra faire l’objet d’audiences publiques et d’une étude d’impact environnemental.

- Doit-on permettre la privatisation des services d’eau municipaux ? Non, cela n’est pas souhaitable car la responsabilité des élus sur ces équipements essentiels à la santé publique en serait diminuée.

La principale recommandation du Rapport propose une façon radicalement différente de gérer les eaux souterraines, une façon intégrée, et d’en confier la responsabilité au ministre de l’Environnement. Cette approche avait déjà été proposée, au Québec, par la Commission Legendre de 1971, mais n’avait pas été retenue. En 1988, la Commission mondiale de l’environnement, la Commission Brundtland, faisait sienne cette proposition et lui donnait une grande crédibilité. Ainsi, une loi sur l’eau coordonnerait et intégrerait les dispositions législatives relatives à l’eau qui apparaissent présentement dans un grand nombre de lois et relèvent d’autant de ministres sectoriels. Le caractère patrimonial et collectif de l’eau serait alors confirmé.

La Commission recommande que l’on réhabilite les réseaux d’aqueduc et d’égoûts vieillissants et que l’on revoie les normes relatives à l’eau potable (présence de bactéries) pour tenir compte des progrès techniques réalisés depuis leur dernière mise à jour en 1984 et des plus récentes normes internationales. Mais la pollution qui préoccupe le plus la Commission, c’est celle qui est d’origine agricole. Une révision majeure de la politique d’assainissement agricole est recommandée car, à présent que la pollution de l’eau d’origine industrielle a été considérablement réduite, ce sont les pesticides et les engrais qui menacent le plus des systèmes hydriques entiers.

Le ministre de l’Environnement, Paul Bégin, a réagi très favorablement à l’ensemble des recommandations. Il a l’intention de soumettre très rapidement au Gouvernement les orientations qu’il devrait retenir de ce rapport de la Commission Beauchamp et de préparer, au cours des prochains mois, la nouvelle politique de l’eau.
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***** LA CAISSE DE DÉPÔT ET PLACEMENT

Une autre bonne performance en 1999

La Caisse de dépôt et de placement a complété le dernier exercice financier avec des revenus nets de 11,3 milliards $, représentant un rendement global de 16,5 % de son portefeuille. L’actif net s’est par ailleurs accru de 12,5 milliards $ pour atteindre 81 milliards $ en fin d’année.

Les rendements réalisés dans la gestion des portefeuilles spécialisés ont surpassé tous les indices qui leur servent de référence. Le portefeuille d’actions canadiennes (22,3 milliards $ d’actifs) a obtenu un rendement de 32,7 % comparativement à 31,7 % pour le TSE 300, l’indice de la bourse de Toronto. Dans le cas des actions américaines (3,9 milliards $ d’actifs), le rendement a été de 20,5 % par rapport à 19,5 % pour le S&P 500. Le rendement du portefeuille des autres actions étrangères a été de 43,1 % versus 37,6 % pour l’indice de référence. La contre-performance du portefeuille d’obligations (28,6 milliards $), qui a connu un rendement négatif de -0,1 %, est toutefois meilleure que celle de l’indice de référence (-1,14 %).

Les filiales de placements négociés, ou filiales de participations, ont réalisé pour leur part un rendement de 27,4 %, ce qui égale pratiquement leur rendement de 27,8 % de l’exercice précédent, qui comprenait un gain exceptionnel résultant de la vente de la chaîne d’alimentation Provigo conclue à la fin de 1998. Ces placements négociés totalisaient 6,9 milliards $ à la fin de l’exercice. Le rendement moyen de la Caisse dans ce type de placement se maintient depuis 5 ans à 27,3 %.

Ouverture d’un bureau à Paris

Inauguré en janvier dernier par le président du conseil Jean-Claude Scraire, ce bureau, situé rue du faubourg Saint-Honoré, sera responsable de la gestion des investissements de la Caisse sur le continent européen. La direction en sera confiée à Gérard Dussillol.

La Caisse a profité de cet événement pour annoncer la signature d’un protocole d’acquisition de droits de construire portant sur 202 000 m² dans le secteur de La Défense, à Paris. Ces droits incluent la Tour Adria présentement en construction, d’une superficie totale de 59 500 m². Le reste sera réalisé au cours des dix prochaines années. La réalisation de ces projets accroîtra de façon significative les investissements immobiliers de la Caisse dans la région parisienne, qui comprennent présentement six immeubles, tous situés dans le quartier de La Défense, et qui totalisent 177 000 m².

La Caisse de dépôt et placement est le plus important investisseur canadien sur les marchés étrangers. En Europe, son portefeuille totalise 10,4 milliards $ (7,1 milliards d’euro), comprenant des placements de participation, des placements de portefeuille boursiers et obligataires et des investissements immobiliers.
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***** INDICATEURS ÉCONOMIQUES

Le taux d’escompte

La Banque du Canada a accru son taux d’escompte de 5 % à 5,5 % au cours des quatre premiers mois de l’an 2000.

Le dollar canadien

Le taux de change du dollar canadien en devises américaines (US) a légèrement fléchi de 68,30¢ US à la fin de décembre 1999 à 67,87¢ US à la fin d’avril dernier. Son sommet de la période a été de 69,4¢ US.

Le PIB

En 1999, le produit intérieur brut du Québec s’est accru de 3,8 % par rapport à 1998, inflation non comprise de 1,2 %. Le poste de la rémunération des salariés s’est accru de 3,4 % et celui des bénéfices avant impôts s’est accru de 17,1 %, inflation comprise dans ces deux cas.
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***** ACQUISITIONS ET FUSIONS EN COURS

BCE acquiert Téléglobe

Bell Canada Entreprise (BCE), le holding qui possède le réseau téléphonique Bell desservant le Québec et l’Ontario, s’est porté acquéreur en février des 77 % d’actions de Téléglobe qui n’étaient pas déjà en sa possession. Les deux principaux actionnaires de Téléglobe, Kenney Trout (18 %) et Charles Sirois (8 %), ont accepté l’offre de BCE et recommandé aux autres actionnaires d’en faire autant. Par cette acquisition, le patrimoine de Bell s'enrichit d’un réseau mondial de communication de première valeur.

Ce dénouement n’aurait pas été prévisible il y a un an. BCE envisageait alors de vendre sa participation de 23 % dans Téléglobe, qui connaissait une expansion spectaculaire sous la direction de Charles Sirois. Parvenu à la direction de l’entreprise il y a huit ans, ce dernier s’était acquis une réputation de visionnaire en faisant de Téléglobe le troisième réseau de communication international.

La situation s’est retournée à la suite de l’acquisition en novembre 1998 d’Excel Communication, un fournisseur américain de services interrurbains fondé par Kenney Trout. Le prix payé pour cette acquisition s’est avéré trop élevé, faisant de cette filiale un boulet qui a fait péricliter Téléglobe. En un an, la compagnie a perdu les deux tiers de sa valeur boursière.

Offre de Rogers Communication pour l’acquisition de Vidéotron

C’est au début de février qu’est tombée la nouvelle d’une entente entre ces deux entreprises de communication. Celles-ci sont impliquées dans la câblodistribution, la téléphonie sans fil ainsi que dans l’internet et desservent des marchés complémentaires. Les activités de Vidéotron sont concentrées au Québec et celles de Rogers dans les provinces anglophones. La réunion des deux entreprises constituerait le 7e joueur en importance en Amérique du Nord et en ferait un concurrent sérieux de BCE.

Dans un premier temps, l’annonce de la transaction a suscité des inquiétudes diffuses, mais semblait être bien reçue dans les milieux concernés. Un seul aspect de la transaction faisait problème, le sort de TVA. Celui-ci est le deuxième réseau de télévision en importance du Québec et une entreprise de contenu télévisuel dont la propriété intéresse plusieurs segments de la population.

La Caisse de dépôt et placement, qui détient 18 % des actions de Vidéotron, a demandé des assurances à l’effet que TVA serait exclu de la transaction. Il a fallu attendre quelques semaines pour apprendre que la Caisse détenait un droit de veto sur toute décision importante de la compagnie, en vertu d’une convention d’actionnaires signée il y a plusieurs années, et qu’elle se proposait d’exercer son droit de veto pour bloquer la transaction. La Caisse alléguait qu’elle n’avait pas été informée des pourparlers entre Vidéotron et Rogers et qu’elle n’était pas rassurée sur le sort réservé à TVA dans la transaction. À la fin de mars, Quebecor, avec la bénédiction de la Caisse, y allait d'une offre jugée équivalente pour les actionnaires, mais qui a été refusée par la direction de Vidéotron. Celle-ci a d'ailleurs porté l'affaire devant les tribunaux, en contestant la validité du droit de veto de la Caisse.

Cette affaire soulève une question qui retient de plus en plus l'attention au Québec et dans tous les autres pays. Qu'adviendra-t-il du contrôle des entreprises de communication dans le contexte de la mondialisation et de l'ouverture des marchés ? Jusqu'où peuvent aller les mesures protectionnistes pour préserver la diversité culturelle ?

Cartons Saint-Laurent passe aux mains de Smurfit-Stone

Le géant américain Smurfit-Stone, le plus grand producteur nord-américain d'emballages cartonnés, a annoncé à la mi-février qu'il en était venu à une entente avec les actionnaires de Cartons Saint-Laurent pour l'acquisition de l'entreprise québécoise. Cette dernière est spécialisée dans la production de cartons d'emballages à surfaces blanchies, un produit très recherché parce qu'il permet l'impression sur les emballages. Ses ventes ont atteint 916 millions $ en 1999, tandis que celles de Smurfit ont été de 7,2 milliards $. Mentionnons que Smurfit-Stone posséde déjà 300 établissements à travers le monde et emploie 35 000 personnes.

Transaction entre Abitibi-Consol et Donohue

Une transaction évaluée à 7,1 milliards $ fera passer Donohue, la filiale papetière de Quebecor, sous le contrôle de Abitibi-Consol, qui deviendra un des plus importants producteurs nord-américains de papier journal avec 30 % des parts du marché. Les actionnaires de Donohue recevront 42 $ par action, soit 11 $ comptant et le reste en actions d'Abitibi-Consol dont ils détiendront environ 55 % des actions en circulation. Quebecor recevra 291 millions $ comptant et des actions qui en feront le principal actionnaire d'Abitibi-Consol.

La transaction comporte un élément de surprise puisque c'est l'entreprise la moins rentable qui sera au commande de la nouvelle société. Abitibi-Consol était déficitaire depuis quelques années tandis que Donohue se maintenait dans la rentabilité grâce à une gestion efficace et à sa structure de coûts la plus faible de l'industrie. Des mesures de rationalisation seront prises à la suite de la transaction pour abaisser les coûts de production de la nouvelle entreprise. Elles viseront surtout les usines les plus anciennes d'Abitibi-Consol. En 1999, la capacité de production de la compagnie a été réduite de 450 000 tonnes par suite de la fermeture d'installations opérant à coûts élevés et on prévoit une réduction additionnelle de 515 000 tonnes au cours des prochains 18 mois. Les analystes y voient une prise de contrôle inversée, dans laquelle Donohue, une société rentable, se laisse acheter par une entreprise déficitaire depuis trois ans. Le sort de la direction de Donohue n'est pas encore connu, mais les experts y voit une chance pour Abitibi-Consol de renforcer son équipe de gestion.

La nouvelle entreprise regroupera 25 usines de papier au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni, avec une capacité de production de 6,3 millions de tonnes. Elle détiendra en plus 19 scieries, ce qui en fera le cinquième producteur de bois d'oeuvre en Amérique du Nord. La compagnie possède aussi des participations minoritaires dans quatre usines de papier en Asie.
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***** DAVIE 2000, PROPRIÉTÉ AMÉRICAINE

Menacées de faillite depuis 1998, les Industries Davie ont été acquises par le Consortium Syntek/Transcontinental le 5 avril et ont pris le nom de Davie 2000. Syntek est une importante compagnie américaine spécialisée dans le domaine maritime et Transcontinental Capital Ventures est un groupe new-yorkais de gestion financière spécialisé dans le redressement d’entreprises en difficulté. Syntek était membre du précédent consortium Desgagnés-Océan-Syntek qui a échoué dans sa tentative d’acquérir Davie.

L’annonce a été bien reçue des 700 créanciers qui ont pu recouvrer leur dû et des employés qui ont bon espoir de retrouver du travail. Davie 2000 laisse entrevoir le rappel de quelque mille travailleurs d’ici la fin de l’année.
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***** L'INSTITUT DE RECHERCHE EN ÉCONOMIE CONTEMPORAINE (IRÉC)

Cet institut a vu le jour à Montréal à la fin de mars dernier à l'initiative de personnalités du milieu universitaire et du monde des affaires reconnues pour leur expertise en matière économique. Le nouvel organisme, dont tous les membres sont bénévoles, sera financé par des subventions gouvernementales et des dons provenant d’entreprises privées et de particuliers. Il est dirigé par un conseil d’administration de neuf membres dont le président est Henri Joli-Coeur.

La direction de l'IREC est assurée par Jean Labrecque alors que Jacques Parizeau, ancien Premier ministre du Québec et économiste réputé, préside quant à lui le comité de recherche. Devant la montée du néo-libéralisme et de la mondialisation des marchés, il importe, selon l’IREC, de trouver des solutions de rechange au discours dominant qui réduit singulièrement la capacité des États à intervenir dans le monde de l’économie.

L’Institut se propose d’abord de recenser les travaux des universités et centres de recherche reliés à l’économie, de collaborer à la mise en place de nouveaux instruments d’analyse économique et de commander des études. Il s’est doté d’un site Web dont l’adresse est www.irec.net. On y présente des études et l’on y trouvera bientôt un répertoire des thèses de doctorat et mémoires de maîtrise en économie réliés au Québec.