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PRINTEMPS-ÉTÉ 2001 

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INTERNATIONAL

***** LE SOMMET DES AMÉRIQUES DE QUÉBEC

Le phénomène des sommets

L'histoire des sommets commence dès 1956 alors que les chefs de 14 États se réunissent à Panama City afin de donner un nouvel élan à l'Organisation des États américains (OEA) fondée en 1948. Mais c’est en 1994 que les États des Amériques s'engagent dans une structuration des relations interaméricaines en matières politique, économique et sociale lors du Sommet de Miami (Floride). Il sera suivi de celui de Santiago (Chili) en 1998, et du Sommet de Québec, du 20 au 22 avril 2001.

L'envergure des enjeux discutés, le caractère public très limité des échanges et, surtout, l’importance des décisions qui s'y préparent ont fait apparaître un mouvement d'opposition, voire d'hostilité. Ainsi, se sont développés des événements parallèles visant à permettre à la société civile de s'exprimer et de tenter d’influencer les sommets officiels, tandis que des manifestations hostiles voulaient les perturber. Ainsi, à Québec, le Sommet des Peuples a d'abord précédé le Sommet des Amériques, puis des manifestations hostiles ont accompagné la tenue de l'événement.

Le Sommet de Québec

Le renforcement de la démocratie et l'intégration économique sont devenus les deux piliers qui soutiennent le processus des sommets des Amériques. Les 34 chefs d'État ou de gouvernement présents au Sommet de Québec ont paraphé une déclaration appelant à la création, d'ici 2005, de la plus grande zone de libre-échange au monde, la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) qui regroupe plus de 800 millions de personnes. Ils ont également entériné une clause qui fait du respect de la démocratie une condition essentielle pour participer aux sommets des Amériques, dont le prochain doit se tenir en Argentine en 2004.

L'Organisation des États américains rassemble les 35 pays du continent, mais Cuba, en raison de la piètre situation de sa démocratie, n'a pas été invité à Québec. Par ailleurs, la situation politique discutable d'Haïti a été jugée perfectible. Ce pays a donc été invité, mais il se trouve pratiquement sous surveillance au sein de l'OEA. D'ailleurs, un paragraphe de la déclaration finale du Sommet lui a été nommément consacré.

Le Sommet de Québec marque aussi le début de l'ouverture des sommets à un dialogue avec la société civile. Les organisateurs (et le gouvernement du Québec) ont voulu faciliter cette ouverture en permettant - notamment par du financement - la tenue d'une manifestation parallèle, le Sommet des Peuples, immédiatement avant le sommet officiel. L'événement a mis en lumière certaines oppositions farouches au libéralisme économique en général et au projet de ZLEA en particulier, mais il a eu le mérite, selon le Premier ministre du Québec, Bernard Landry, de sensibiliser la population aux enjeux du libre-échange et de la mondialisation. Le Sommet des Peuples s'est terminé par une impressionnante marche pacifique organisée avec le concours des syndicats et regroupant plusieurs dizaines de milliers de participants.

Les manifestations violentes, quant à elles, ont été contenues à l’extérieur du périmètre de sécurité (une clôture de quatre kilomètres) érigé pour la circonstance. Des manifestants sont montés à l’assaut de la clôture qui fermait ce périmètre, ils ont lancé divers objets aux policiers. Ces derniers ont fait un grand usage des gaz lacrymogènes et ont lancé des balles de plastique mais se sont comportés avec beaucoup de discipline. Un groupe de cinq experts indépendants avait été mandaté par le ministre de la Sécurité publique, Serge Ménard, pour observer le travail des corps policiers sous l’angle du respect des droits de la personne. Leur rapport indique que "le comportement des policiers (…) n’a pas (…) entraîné de restrictions ou de limitations non raisonnables des droits fondamentaux à la liberté d’expression ou de réunion pacifique ou à la sécurité de la personne". Ils jugent cependant que le recours aux balles de plastique n’était pas justifié et que l’usage du gaz lacrymogène en aussi grande quantité était peut-être excessif. Un policier de Seattle (cette ville avait été mise à rude épreuve), venu observer la sécurité du Sommet de Québec, a quant à lui décerné un A+ au comportement des forces policières.

Le Québec et le Sommet

Le gouvernement du Québec n'a pas obtenu la place qu'il souhaitait au Sommet, malgré de nombreuses tentatives du Premier ministre Bernard Landry et de la ministre des Relations internationales, Louise Beaudoin. L'attitude du gouvernement fédéral s'est avérée mesquine, ne permettant même pas au Premier ministre Landry d'assister à la cérémonie religieuse œcuménique. Le gouvernement du Québec a voulu cependant souligner l'événement en organisant, avec la Ville de Québec, un programme d’activités festives et amicales, Québec salue les Amériques, durant les jours qui ont précédé le Sommet lui-même.

Le gouvernement du Québec estime pouvoir contribuer au processus d'intégration hémisphérique et réclame, au nom des responsabilités constitutionnelles qui sont les siennes, de pouvoir participer aux mécanismes de suivi du Sommet. Tout comme les premiers ministres des autres provinces du Canada, le Québec réclame d'Ottawa un mécanisme efficace en ce qui concerne les négociations commerciales internationales. Il va même jusqu'à remettre en cause son adhésion à d'éventuels engagements du gouvernement fédéral dans les domaines qui sont, selon la constitution canadienne, de sa compétence.

L'essentiel de la position du gouvernement du Québec sur le projet de création de la ZLEA et sur le plan d'action du Sommet peut se résumer comme suit : "oui à l'économie de marché, non à la société de marché". Malgré un point de vue généralement favorable à la libéralisation des échanges économiques, l'adhésion au libre-échange ne va pas sans conditions et le gouvernement québécois souhaite maintenir sa capacité d'agir dans des domaines précis tels que la culture, l'éducation, la santé et le travail, qui relèvent de sa compétence. Pour y parvenir, Québec réclame un mécanisme formel de participation des provinces à la préparation, à la négociation et à la mise en œuvre des accords internationaux de commerce.

Le gouvernement du Québec souhaite également que la mise en place de la ZLEA contribue au développement harmonieux des petites économies et des pays en développement des Amériques et tout cela dans le respect des prérogatives des parlementaires et des positions de la société civile. De plus, le français doit bénéficier, dans les Amériques, du même statut que l'anglais, l'espagnol ou le portugais. Enfin, la ministre des Relations internationales du Québec, Louise Beaudoin, s’est inquiétée de l'absence de référence directe à la langue et à la culture dans la déclaration finale du Sommet, alors que les mots "cultures" et "langues" étaient bien inscrits dans le texte préliminaire qui avait circulé.

Entretiens obtenus par le Premier ministre

En marge du Sommet, le Premier ministre Landry a pu s'entretenir avec quelques chefs d’État et ainsi faire valoir les positions du Québec quant à l'intégration continentale des Amériques et discuter de questions bilatérales. Bernard Landry a eu des entretiens avec le président du Mexique, Vicente Fox, avec la présidente du Panama, Mireya Moscoso, avec le président de l'Argentine, Fernando de la Rua, et celui du Chili, Ricardo Lagos. Il s'est également entretenu avec le Secrétaire d’État au Commerce des États-Unis, Donald L. Evans.

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***** LA DÉCENNIE QUÉBÉCOISE DES AMÉRIQUES

Le programme la Décennie québécoise des Amériques, lancé par le Premier ministre Lucien Bouchard en mars 1999, veut faire en sorte que le Québec participe pleinement au rapprochement qui est en cours entre les peuples des Amériques tant sur le plan des échanges économiques que sur les plans éducatif, culturel, linguistique et institutionnel. Ce programme veut augmenter de 500 à 1500 le nombre d’entreprises qui exportent vers l’Amérique latine, augmenter de 50 % le nombre de Québécois qui, en plus du français et de l’anglais, parlent l’espagnol, et multiplier les échanges de jeunes.

Un certain nombre d'initiatives ont été prises à cet effet :

- le gouvernement du Québec a augmenté sa présence dans les Amériques en ouvrant des délégations à Boston, Chicago, Los Angeles et Buenos Aires, un bureau à Miami et des antennes à Santiago (Chili) et San José (Costa Rica);

- le Premier ministre a présidé d’importantes délégations composées surtout de gens d’affaires tant au Mexique, en Argentine, au Chili qu’aux États-Unis (Californie et Wisconsin) et le Vice-premier ministre a présidé une semblable délégation au Costa Rica et au Panama;

- un Office Québec-Amériques pour la jeunesse (OFAJ) a été créé pour favoriser les échanges de jeunes;

- le ministère de l’Éducation doit veiller à ce que l’apprentissage de la langue espagnole soit offert dans toutes les régions du Québec.

Les résultats sont déjà remarquables. Le nombre d’entreprises québécoises qui exportent vers l’Amérique latine a augmenté de 60 %, plusieurs centaines de jeunes se sont rendus dans une quinzaine de pays latino-américains pour améliorer leur connaissance de l'espagnol et de nombreuses ententes de coopération ont été signées. Le nouveau Premier ministre Bernard Landry donne d'ailleurs l’exemple aux Québécois. Sétant mis à l'apprentissage de l’espagnol au début des années 1980, il s’exprime dans cette langue avec facilité. Lors du Sommet des Amériques, il a prononcé une bonne partie de ses discours en espagnol.

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***** RELATIONS INTERNATIONALES DU QUÉBEC : PLAN STRATÉGIQUE 2001-2004

Ce n’est pas la première fois que le ministère des Relations internationales (MRI) énonce ses orientations, ses priorités et qu’il publie une lecture de la situation du Québec dans son environnement international. Outre ses rapports annuels qui sont présentés à l’Assemblée nationale, le MRI, malgré sa courte histoire (la loi l’instituant date de 1974), a déjà publié deux énoncés de politique internationale : Le Québec dans le monde en 1985 et La politique d’afffaires internationales en 1991.

Le présent document intitulé Le Québec dans un ensemble international en mutation. Plan stratégique 2001-2004 est le premier fruit de ce qui sera désormais un exercice triennal. En effet, le nouveau cadre de gestion de l’administration publique du Québec prévoit que chaque ministère et organisme public se dote d’un tel plan stratégique mis à jour annuellement. Il s’agit donc d’un document administratif aux figures imposées, comme l’on dit dans les concours de patin sur glace, et le ministère des Relations internationales a dû y inscrire sa spécificité comme dans un lit de Procuste.
On y trouve d’abord une description du Ministère (son mandat, ses fonctions, son organisation, ses moyens) suivie d’un bref relevé des réalisations des deux dernières années : lancement de la Décennie québécoise des Amériques, inauguration des Saisons du Québec à l’étranger (en France en 2000, à New York en 2001), création de l’Office Québec-Amériques pour la jeunesse et du Programme d’invitation et d’accueil de personnalités étrangères, et publication du Guide de la pratique des relations internationales du Québec. Les deux chapitres suivants décrivent, d’une part, "le contexte de l’action internationale du Québec en 2001" et, d’autre part, "les intérêts, les enjeux et les orientations du Québec sur le plan international" qui en découlent.

En fin, le chapitre 5, le plus substantiel du document, définit quelles sont "les priorités du Québec sur la scène internationale", énonce des objectifs précis et même mesurables en autant que faire se peut. En raison de sa facture technocratique et de l’importance des détails, ce chapitre ne se résume pas. Il faut inviter le lecteur à en prendre connaissance directement via le site internet du ministère des Relations internationales du Québec au www.mri.gouv.qc.ca

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***** MISSIONS ÉCONOMIQUES EN EUROPE ET EN CHINE

En février 2001, et pour une dernière fois avant de quitter la vie politique, Lucien Bouchard partait à l’étranger faire la promotion des produits et du savoir-faire québécois. Une huitième édition de Mission Québec a d’abord conduit le Premier ministre en Espagne et en Italie. Peu après, le Premier ministre Bouchard s'est dirigé vers la Chine afin de participer à Équipe Canada.

Mission Québec en Europe

La mission en Espagne et en Italie, axée principalement sur la prospection d'investissements, affiche des résultats éloquents : 2700 emplois créés au Québec et des investissements de 1 milliard $.

C'est en Espagne qu'elle a obtenu les meilleurs résultats. Signalons notamment l’entente de 700 millions $ conclue entre la Société générale de financement (SGF) du Québec et la multinationale espagnole CEPSA. (Lire le texte Usine pétrochimique à Montréal-Est)

En Italie, on doit signaler la conclusion d'un partenariat entre Parmalat SpA et la firme québécoise Eaux vives Harricana, pour la construction en Abitibi d'une usine d'eau embouteillée d'une valeur de 51,4 millions $, avec le marché américain dans la mire.

L'étape romaine de Lucien Bouchard fut familiale et plus précisément vaticane puisque la famille du Premier ministre, accompagnée de l'archevêque de Montréal, le cardinal Jean-Claude Turcotte, a été reçue en audience privée par Jean-Paul II. Le Premier ministre Bouchard, sa femme Audrey Best-Bouchard, et leurs fils Alexandre et Simon, âgés de 11 et 9 ans, sont sortis visiblement radieux et émus de cet entretien empreint de simplicité et de chaleur, entretien qui s'est tenu, fait rare, dans le bureau du Saint-Père.

Équipe Canada en Chine

La moisson québécoise auprès de ce vaste marché de consommateurs se chiffre à 1,7 milliard $, dont 430 millions $ en contrats fermes. Le plus important contrat est allé à Bombardier qui a vendu six Regional Jet de 50 passagers à China Yunnan Airlines, pour une valeur de 210 millions $. Signalons aussi l’investissement de 45 millions $ que la société d’État chinoise, China Worldbest Group, fera à Drummondville où elle construira une usine de textiles haut de gamme qui donnera de l'emploi à 380 personnes.

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***** LA RÉALITÉ AUTOCHTONE EXPLIQUÉE EN EUROPE

Le ministre québécois responsable des affaires autochtones, Guy Chevrette, a effectué une mission en Europe, du 30 janvier au 10 février 2001, auprès de parlementaires, de diplomates et de leaders d'opinion. Il était accompagné de trois chefs autochtones, Pita Aatami, président de la Société inuite Makivik, Simon Awashish, chef de la communauté attikamek d’Obedjiwan, et Clifford Moar, chef de la communauté innue (montagnaise) de Mashteuiatsh. Cette mission sans précédent a permis à ses quatre membres d'expliquer la question autochtone sur un continent où les jugements parfois excessifs résultent généralement d'une méconnaissance de la réalité. À Paris, Bruxelles puis Londres, ils ont évoqué la difficulté de concilier tradition et modernisme, et ont abordé les problèmes et les difficultés spécifiques des relations du gouvernement avec les peuples autochtones : "tout n'est pas rose, mais tout n'est pas noir", a fait valoir le ministre.