QUÉBEC Info
PRINTEMPS-ÉTÉ 2004
Politique Économie Education International Société Culture ****GROUPE JEAN COUTU AUX ÉTATS-UNIS
La chaîne québécoise de pharmacies Jean Coutu a fait l’acquisition de 1 539 magasins du groupe américain Eckerd pour un montant de 2,4 milliards US. L’intention du groupe de réaliser une acquisition aux États-Unis était connue depuis l’automne dernier, mais la transaction surprend tout de même en raison de son importance. La taille du groupe triplera et plus de 90 % du chiffre d’affaires sera réalisé dorénavant au sud de la frontière. Avec cette acquisition, le groupe Jean Coutu comptera 2 196 magasins, dont plus des trois quarts sont situés aux États-Unis ; cela le place au quatrième rang des chaînes de pharmaciens détaillants en Amérique du Nord.
Un développement par acquisition
L’histoire de l’entreprise commence en 1969 avec l’ouverture d’une première pharmacie à Montréal par le fondateur, le pharmacien Jean Coutu. Le développement se fait d’abord au Québec, par le regroupement de pharmacies indépendantes ou de petits groupes de pharmacies en franchise. En 1987, on compte déjà 120 magasins sous la bannière Jean Coutu au Québec, lorsque le groupe entreprend un développement rapide aux États-Unis. L’acquisition de la chaîne Brooks Drug Stores, en 1994, double la taille du groupe dont plus de la moitié du chiffre d’affaires est réalisé désormais aux États-Unis.
Par la suite, la croissance du groupe Jean Coutu plafonne. Or la stratégie du groupe est fondée sur la croissance et dans ce secteur d’activités comme dans les autres branches du commerce de détail, la clé de la compétitivité est le pouvoir d’achat, lui-même lié à la taille. Au Canada, les perspectives de croissance du groupe sont limitées ; une tentative d’acquisition de la chaîne canadienne Shoppers Drug Mart a échoué en 1999 au profit d’un concurrent américain. Il n’est donc pas étonnant de voir le groupe se tourner maintenant vers les États-Unis où son programme d’acquisitions n’est sans doute pas terminé.
Une grosse pilule à avaler
Les analystes s’interrogent sur la capacité du groupe Jean Coutu de réussir l’intégration des nouveaux magasins. La chaîne Eckerd, qui appartenait au géant du commerce de détail JCPenney, connaissait depuis plusieurs mois des problèmes de rentabilité et son redressement constituera un défi pour le groupe québécois, en raison du nombre de magasins impliqués. La direction se dit confiante de remporter le défi, forte de son expérience heureuse dans l’intégration de la chaîne Brooks ; celle-ci comptait 221 magasins localisés dans le nord-est des États-Unis comme ceux qui ont été acquis de Eckerd. Mais le groupe Jean Coutu devra affronter aussi la concurrence très agressive de chaînes beaucoup plus importantes comme CVS (5 442 magasins) ou Walgreens (4 368 magasins) ; la pilule pourrait donc être difficile à avaler.
****HYDRO-QUÉBEC
Profits en hausse mais sérénité en baisse
Les profits d'Hydro-Québec ont atteint le niveau record de 1,93 milliard en 2003 grâce à la forte croissance de la consommation électrique au Québec et à la réduction plus forte que prévu des frais financiers. Il s'agit d'une bonne nouvelle pour le ministre des Finances qui, en vertu d'un décret gouvernemental, encaissera un dividende de 965 millions, soit 50 % des profits. Autre bonne nouvelle venant de la société d'État : la conclusion avec la nation cri d'une entente qui règle les litiges du passé avec la communauté autochtone et assainit le climat entourant le développement futur du potentiel hydroélectrique sur son territoire. Cette nouvelle est d'autant plus réjouissante pour la direction que les perspectives sont de plus en plus sombres dans les autres filières. Sous la pression de groupes écologistes, Hydro-Québec a dû abandonner un à un divers projets de petites centrales hydroélectriques qui figuraient dans son dernier plan stratégique ; elle doit maintenant affronter les mêmes groupes pour défendre deux projets de centrales thermiques devant la Régie de l'énergie. Les groupes écologistes favorisent plutôt la filière éolienne, pour laquelle Hydro-Québec n'a jamais montré un grand intérêt, et réclament une politique d'économie d'énergie beaucoup plus dynamique.
La demande québécoise gonfle les profits
La hausse des profits s’est réalisée en dépit d’une baisse de 1,7 milliard sur les ventes hors Québec ; c’est que la consommation intérieure a crû de 5,5 %. Pour leur part, les achats d’électricité hors Québec ont diminué de 1,7 milliard, ce qui a contribué aussi à la croissance des profits. Mai c'est surtout une diminution plus importante que prévu des frais financiers qui a permis d'atteindre ce résultat record. La diminution de 325 millions à ce chapitre est due en partie à la hausse subite de la devise canadienne par rapport au dollar américain ; de plus, la société a profité de la baisse des taux d'intérêt pour renégocier une partie de sa dette. La performance d’Hydro-Québec a porté le rendement sur le capital propre à 13,2 % alors qu’il était de 11 % en 2002.
Les résultats obtenus dépassent sensiblement les prévisions de la direction : en janvier le président du conseil se félicitait de prévoir 1,7 milliard de profits. Toutefois, Hydro-Québec ne peut s’attendre à une nouvelle amélioration de ses profits en 2004, en raison de la variation du taux de change et de la hausse possible des taux d'intérêt.
La paix hydroélectrique avec les Cris
L'accord entre Hydro-Québec et la nation cri s'inscrit dans le cadre de l'entente politique conclue en 2002 et que l'on a baptisée *la Paix des braves+. Cet accord met fin à 20 ans de conflits liés aux projets hydroélectriques réalisés sur le territoire cri. Il prévoit le versement par Hydro-Québec d'une indemnité annuelle de 7 millions pour les inconvénients causés par le complexe hydroélectrique La Grande ; il garantit également des retombées économiques croissantes pour les entreprises et les travailleurs cri engagés dans les travaux d'entretien et de réparation des installations du complexe. De leur côté, les Cris abandonnent les nombreuses poursuites qu’ils avaient intentées contre Hydro-Québec en rapport avec la construction et l'exploitation du complexe La Grande. L'entente reste muette sur les projets qui pourraient être entrepris à l’avenir sur le territoire cri mais elle crée un climat favorable à des négociations pour de nouvelles installations.
La filière thermique de plus en plus incertaine
Les difficultés rencontrées dans la planification des grands projets hydroélectriques et les retards qui en résultent dans leur mise en œuvre ont incité Hydro-Québec à se tourner vers la filière thermique de manière à pouvoir répondre à la croissance de la demande à moyen terme. Deux projets d'importance ont été mis de l'avant : le projet Suroît, qui serait réalisé par Hydro-Québec elle-même, à l'ouest de Montréal, et un autre projet qui serait situé à Bécancourt et confié à la société albertaine TransCanada Energy. La décision du gouvernement québécois d’autoriser ces deux projets dépend des résultats d'une étude de la Régie de l'énergie sur les besoins énergétiques du Québec et sur l’éventail des solutions permettant d’y répondre. Cette étude a été entreprise en vertu d'un mandat spécial confié à la Régie en février 2004, à la suite des protestations soulevées par l’autorisation que le gouvernement Charest avait accordée au projet Suroît.
L'histoire publique de ce projet débute en septembre 2001 par un avis d'Hydro-Québec au ministre de l'Environnement sur la création d’une centrale thermique d’une capacité de 800 mégawatts et alimentée au gaz naturel. En janvier 2003, le Bureau des audiences publiques sur l'environnement (BAPE) émettait un avis négatif sur ce projet, mais en décembre le gouvernement a néanmoins accepté un projet amélioré ; cette décision a suscité une levée de boucliers dans les milieux voués à la protection de l’environnement. Le gouvernement s'est alors tourné vers la Régie de l'énergie dont le mandat est d’examiner l'ensemble des plans de développement d'Hydro-Québec. La filière éolienne a de nouveau sa place dans le débat ; elle a la faveur des écologistes qui voient une victoire dans le recul du gouvernement, mais s'inquiètent du peu de temps dont dispose la Régie de l'énergie pour réaliser son étude : son rapport doit être terminé à la fin de juin.
Un potentiel éolien insoupçonné
Selon une étude réalisée à la demande d’un regroupement d'organismes préoccupés par l’environnement, le potentiel de développement de l'énergie éolienne au Québec pourrait surpasser celui de l'hydroélectricité, qui est pourtant très important. En se limitant à la partie sud du territoire québécois et au voisinage du réseau de transport d’électricité déjà installé, l'étude évalue à 40 000 MW les réserves d'énergie éolienne exploitables, soit l'équivalent de la capacité actuelle installée en hydroélectricité. Les parcs d'éoliennes devraient toutefois être jumelés avec les centrales hydroélectriques ; celles-ci pourraient reconstituer leurs réserves hydrauliques lorsque les vents permettent l'utilisation des éoliennes. Les résultats de l'étude seront mis à profit par les partisans de l'énergie éolienne pour recommander le développement rapide de 4 000 MW, un volume suffisant pour remplacer la production prévue par le projet Suroît et ce dans des délais comparables.
Hydro-Québec s'en tient pour l'instant aux appels d'offres qu'elle a déjà lancés pour une capacité totale de 1 000 MW produits dans la seule région de la Gaspésie ; des producteurs éventuels s’affairent à y répondre. Par ailleurs, le BAPE a approuvé un projet de 54 MW présenté par la firme 3CI; il serait réalisé à Murdochville, une ville minière menacée d'extinction. Plusieurs autres promoteurs ont exprimé leur intérêt pour des projets de production d’énergie de source éolienne et la création d’usines de fabrication ou de montage de matériel utilisé par cette filière.
Une note discordante a toutefois été entendue au cours des audiences de la Régie de l'énergie ; elle provenait du groupe Axor, l’entreprise qui exploite les deux seuls parcs éoliens du Québec. Le rendement des éoliennes exploitées par le groupe serait de 40 % inférieur aux projections en raison de vents moins soutenus que prévu ; le coût de l'électricité produite est évidemment accru dans la même proportion. Le groupe Axor demeure néanmoins intéressé par l'éolien en raison de son caractère non polluant et des délais très courts requis par l'implantation de cette source d'énergie.
****INDICATEURS ÉCONOMIQUES
Le produit intérieur brut (PIB)
Le produit intérieur brut nominal du Québec s’est accru de 2 % en 2003. La rémunération globale des salariés s’est accrue quant à elle de 4,0 % et le bénéfice des sociétés avant impôt de 8,4 %, inflation comprise.
Le taux d’escompte
Au cours des quatre premiers mois de l’année 2004, le taux d’escompte officiel de la Banque du Canada est passé de 3,00 % à 2,25 %, soit une baisse de 75 points centésimaux.
Le taux de change
Le taux de change du dollar canadien par rapport à la devise des États-Unis d’Amérique est passé de 0,7738 $ US à 0,7313 $ US entre la fin de décembre 2003 et la fin d’avril 2004, soit une dépréciation de 5,5 %.
Par rapport à l’euro, le dollar canadien a connu une très légère hausse, passant de 0,6143 € à 0,6179 € au cours de la même période; il a cependant oscillé entre 0,5919 € et 0,6257 € à l’intérieur de la période.
****ALCAN ACQUIERT PECHINEY
Après le succès de son offre d’acquisition de l’aluminerie Pechiney, Alcan entreprend l’intégration de ses activités avec celle de sa filiale française en vue de maximiser l’effet de synergie. Il s’agit d’une tâche que la direction qualifie de colossale et à laquelle elle affectera environ 500 personnes durant deux ans. Avec cette acquisition, Alcan est devenu le premier producteur mondial d’aluminium ; il emploie 88 000 personnes dans quelque 300 usines réparties dans 60 pays. La direction avait prévu des économies de 250 millions de dollars à la suite de l’intégration de Pechiney ; ce montant avait été établi de façon arbitraire, Alcan n’ayant pu procéder à une vérification diligente en raison du caractère hostile de son offre d’achat. Un premier examen de la situation permet d’évaluer les économies à 360 millions environ.
Les anciens salariés de Pechiney, comme ceux d’Alcan d’ailleurs, ne cachent pas l’inquiétude que leur inspire cette intégration. Les représentants syndicaux ont profité de la dernière assemblée des actionnaires, qui a eu lieu en avril à Montréal, pour faire connaître leur intention de défendre fermement les droits de leurs membres tout au long de l’opération. Deux décisions récentes de la multinationale ont contribué à nourrir les inquiétudes. Alcan annonçait, fin janvier, la fermeture définitive de ses salles de cuves Söderberg de l’usine d’Arvida ; il s’agit d’installations désuètes, qui ne répondent plus aux normes environnementales. Cette décision, qui affecte 550 personnes, a été prise sans avertissement ; les salariés d’Arvida ont répliqué par une occupation de l’usine pendant près d’un mois. La fermeture de ces installations avait déjà été évoquée plus tôt par Alcan, mais elle ne devait avoir lieu qu’en 2014 ou 2015 ; les travailleurs d’Arvida voient dans cette fermeture hâtive une conséquence directe de l’acquisition de Pechiney. Par ailleurs, Alcan annonçait à la fin d’avril la suppression de 330 postes en Europe, dont 277 en France, dans le cadre des opérations d’intégration.
La direction a donné l’assurance que la fermeture des salles de cuves d’Arvida n’entraîneraient aucune perte d’emploi : les salariés touchés se verront offrir un programme d’incitation à la retraite ou seront affectés à d’autres tâches dans l’entreprise. Aucune indication de ce genre n’a été fournie dans le cas des réductions de postes en Europe, mais on peut prévoir que des mesures semblables seront nécessaires.
****ALCOA : REMISE EN QUESTION
Deux projets de la multinationale Alcoa, qui avaient fait l'objet d'une entente avec le gouvernement québécois avant les élections d'avril 2003, ont été remis en question par le nouveau gouvernement. L'agrandissement de l'usine de Deschambault, au coût de un milliard, devait bénéficier d'un prêt sans intérêt de 240 millions et d'un approvisionnement en électricité de 500 mégawatts. La multinationale envisageait par ailleurs un investissement de 1,1 milliard à son usine de Baie-Comeau pour le remplacement de la technologie Söderberg, moyennant l'attribution de 175 mégawatts et l'octroi d'un prêt de 170 millions. Les deux projets devaient aussi bénéficier d'un congé fiscal d’une durée de dix ans. L'investissement à Deschambault devait permettre de doubler la capacité de l'usine et créer 1 250 emplois ; celui de Baie-Comeau entraînait une réduction du nombre de postes, de 1 700 à 1 500, mais si la modernisation n'était pas réalisée, c’est l’ensemble des emplois qui disparaîtraient à moyen terme.
Les négociations se poursuivent au ralenti depuis un an et portent seulement sur le projet de Baie-Comeau. Le gouvernement entend apporter deux modifications importantes à l'entente convenue : il veut réduire le montant du prêt sans intérêt et exiger en contrepartie du bloc supplémentaire d'électricité et du congé fiscal l’engagement d'Alcoa de développer des activités de transformation de l'aluminium. Le nombre de 500 emplois nouveaux a été évoqué ; ils pourraient être localisés à Baie-Comeau ou ailleurs au Québec. Quant au projet de Deschambault, il n'est plus considéré comme prioritaire par les deux parties en raison des incertitudes entourant le développement de la production d'électricité au cours des prochaines années. La direction d'Alcoa envisage avec confiance l'avenir de l’entreprise au Québec, mais invoque les pressions de la concurrence mondiale pour justifier le support gouvernemental à son programme d'investissements.
****MOUVEMENT DESJARDINS : DE BONS RÉSULTATS
Les résultats financiers du Mouvement des caisses populaires Desjardins ont connu une légère baisse en 2003 par rapport au niveau record atteint en 2002. Les trop perçus avant impôts et ristournes ont été de 816 millions, en baisse de 3,8 % par rapport à ceux de l'année précédente ; plus de la moitié de ce montant, soit 440 millions, a été distribué en ristournes aux membres, en supplément d'intérêt sur les dépôts ou en réduction de l'intérêt payé sur les prêts. C’est au quatrième trimestre que les résultats ont baissé, avec des trop perçus de 166 millions par rapport à 281 millions pour la période correspondante en 2002. La tendance s'est toutefois inversée en 2004 : les résultats du premier trimestre montrent une progression de 77 millions par rapport à ceux du premier trimestre 2003.
****GASPESIA : RIEN NE VA PLUS
La relance de l'usine de Papiers Gaspésia à Chandler est compromise depuis la fin janvier en raison d'une mésentente entre les actionnaires sur le financement d’un important dépassement des coûts de modernisation. Le projet consistait à transformer une ancienne usine de papier journal, fermée par Abitibi-Consol en 1999, pour y produire un papier glacé haut de gamme ; cela devait permettre de sauver environ 200 des 500 emplois de l'ancienne usine. Le coût des travaux de modernisation, d'abord estimé à 500 millions, serait plutôt de 700 millions. Le gouvernement du Québec s'est dit disposé à augmenter de 50 millions sa contribution au financement des travaux, une somme qui équivaut à sa mise de fonds initiale, à condition que les deux autres actionnaires haussent leurs contributions respectives dans les mêmes proportions, soit 100 millions pour le Fonds de solidarité de la Fédération des travailleurs du Québec et 50 millions pour Tembec. Le Fonds de solidarité est prêt à accroître sa contribution de 50 millions seulement et demande plutôt que le gouvernement assume une plus grande part des coûts excédentaires. Pour sa part, Tembec n'a pas fait connaître sa position jusqu'à maintenant. La société Papiers Gaspésia s'est placée sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers dans l'attente d’une solution. Une manière de sortir de l'impasse serait l'entrée en scène d'un nouveau joueur; une firme de consultation a reçu le mandat de rechercher ce partenaire éventuel. Il faudrait par ailleurs réduire le coût total du projet.
Le différend sur le partage des coûts additionnels cache toutefois une mésentente plus profonde portant sur la gestion des travaux de modernisation. C'est à Tembec que la gestion du chantier a été confiée, en raison de son expertise dans la gestion de papeteries, mais les deux autres actionnaires se sont réservé un droit de regard sur l'attribution des contrats. Certains y voient la source des problèmes de productivité observés sur le chantier, problèmes auxquels le ministre de l'Industrie et du Commerce attribue la moitié des coûts excédentaires. Ce point de vue est contesté par le président de la Fédération des travailleurs du Québec, gestionnaire du Fonds de solidarité, qui n'y voit qu'un problème de financement : les coûts auraient été sous-estimés dès le départ, mais le nouvel estimé compromet la rentabilité du projet si le gouvernement n'accroît pas sa participation.
On ne s'attend pas à un changement de position chez les actionnaires, du moins tant que les démarches entreprises pour trouver un nouveau partenaire ne seront pas terminées. La mort pure et simple du projet et la liquidation des actifs ne sont pas écartées.
****SAPUTO : LA DIVISION BOULANGERIE
À la dernière assemblée des actionnaires de Saputo, la direction avait révélé qu’elle s’interrogeait sur l'avenir de sa division boulangerie et qu'aucun scénario n'était écarté, pas même celui de la vente. La présence de cette division au sein du groupe résulte de l'acquisition de Culinar en 1999, dans le cadre d'une opération de sauvetage réalisée en collaboration avec la Société générale de financement. Depuis son acquisition par Saputo, la division n'avait connu aucun développement significatif et le peu d'affinité qu'elle présentait avec la production de fromages et de dérivés du lait au cœur des activités de Saputo avait amené la direction a envisager sa vente. Ce scénario est désormais écarté : Saputo conservera la division boulangerie; la firme envisage même de la développer par un redéploiement de ses marques de commerce sur l'ensemble des marchés nord américains.
****AETERNA POURSUIT SON DÉVELOPPEMENT
La direction des Laboratoires Aeterna a révélé en mars dernier qu'elle avait terminé l'acquisition de Pure Encapsulation, une entreprise de biotechnologie de la région de Boston spécialisée dans la fabrication de suppléments alimentaires commercialisés auprès des professionnels de la santé. L'acquisition ajoutera plus de 250 produits à la gamme d'Aeterna et lui permettra d'accroître ses activités sur le marché américain.
Par ailleurs, l'annonce par Aeterna de résultats positifs dans six des essais cliniques de phase II portant sur le cétrorelix a suscité, fin d'avril, un intérêt particulier chez les analystes financiers ; le cétrorelix est un médicament qui permettrait de réduire les effets secondaires des traitements contre le cancer. Ces essais ont été réalisés par Solvay, partenaire européen d'Aeterna. La société n'envisage aucune nouvelle acquisition dans un avenir immédiat ; elle concentrera plutôt ses énergies sur l'intégration de Pure Encapsulation.
****LA CAISSE RETROUVE LA RENTABILITÉ
Après la débâcle de 2002, qui s'était traduite par un rendement négatif de 9,6 %, la Caisse de dépôt et placement a obtenu en 2003 un rendement de 15,2 % et une croissance de 11,5 milliards de l'actif net. Cette performance place l'institution québécoise parmi les meilleurs fonds de placements canadiens pour la rentabilité. Aux yeux de la direction, ce rendement est d'autant plus satisfaisant que la Caisse a misé davantage, en 2003, sur les obligations, conformément à sa politique de gestion prudente, et qu'elle a dû adopter des mesures de protection contre la dépréciation de la devise américaine.
****CANAM MANAC : RESTRUCTURATION
La direction du groupe Canam Manac de Saint-Georges de Beauce annonçait au début d'avril une importante restructuration de l'entreprise. Les filiales Manac et Industries Tanguay sont cédées à des investisseurs québécois, l'usine de Monterey au Mexique est vendue à des intérêts locaux et une usine est fermée à Colombus (Ohio) ; au Québec, l'usine de Laval est temporairement fermée. Ces décisions sont inspirées par une réorientation stratégique que les pertes subies au cours des deux dernières années avaient rendue nécessaire. L'entreprise concentrera désormais ses activités dans le secteur des aciers de structure et des matériaux destinés à la construction commerciale et industrielle et aux travaux d'infrastructure.
Les activités de la division Canam, celles-là même qui ont donné naissance à l'entreprise en 1960, sont conservées. Elles couvrent neuf segments de marché centrés sur la fabrication de poutrelles d'acier et les matériaux de charpentes lourdes pour les ponts, les planchers, etc. Ces produits sont principalement destinés aux marchés canadiens et américains. La division Manac a été fondée par Canam en 1966 pour la fabrication de semi-remorques ; elle est vendue à un groupe d'investisseurs québécois au nombre desquels se trouve un fils du fondateur qui détiendra 20 % des actions. La transaction a été conclue au montant de 65 millions. Cette division connaît une bonne rentabilité et se situe dans un marché en croissance. Quant aux Industries Tanguay, elles avaient été acquises par le groupe en 1988. L'entreprise, fondée en 1951 à Saint-Prime au Lac Saint-Jean, a été une véritable pionnière dans le développement de l'outillage forestier au Québec. Elle est vendue pour 13 millions à deux autres producteurs d'équipements forestiers, les Équipements Quadco et la firme Trans-gesco.
L'ensemble du plan de restructuration entraînera l'élimination de 110 emplois, dont 87 à l'usine de Colombus. Il y a un an, le groupe comptait au total 4 000 salariés ; il en restera 2 500 après la restructuration, dont 1 000 environ chez Manac.
****MAAX VENDUE À DES INTÉRÊTS ÉTRANGERS
L’entreprise MAAX de Sainte-Marie de Beauce, qui fabrique baignoires et accessoires de cuisines, a été vendu à un consortium dirigé par le fonds d'investissement américain, J. W. Childs Associates, pour la somme de 640 millions. La Caisse de retraite des employés municipaux de l'Ontario est un des actionnaires importants, de même que la société canadienne de capital de risque Borealis Capital Corporation qui a joué un rôle d'intermédiaire dans la transaction. Un ancien administrateur de MAAX deviendra chef de la direction et sera actionnaire minoritaire. MAAX est le plus important fabriquant de matériel de salles de bain et de cuisines au Canada. L'entreprise possède 25 usines au Canada et aux États-Unis et emploie 3 800 personnes.
La décision de vendre l'entreprise a été prise en raison de la retraite de l'ancien président ; deux de ses enfants qui travaillaient également dans l'entreprise ont préféré réorienter leur carrière plutôt que de lui succéder. Le nouveau président se réjouit du fait que les nouveaux propriétaires soient des investisseurs et non des concurrents, qui auraient modifié les plans de développement de l'entreprise. De leur côté,les acquéreurs n'ont pas caché leur objectif : la recherche du rendement sur leur investissement, ce qui pourrait les conduire à vendre ces actifs d’ici cinq à dix ans. Pour leur part, les analystes restent perplexes devant la décision des administrateurs de mettre l'entreprise en vente. Le président démissionnaire ne possédait que 14,5 % des actions, une part qu’auraient pu facilement acquérir les autres actionnaires. L'explication la plus plausible est que ceux-ci entendaient réaliser une plus value en sollicitant une offre publique d'achat.